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DU LUNDI 20 JUILLET (19 H) AU JEUDI 30 JUILLET
(14 H) 2009
COMMENT RÊVER LA SCIENCE-FICTION À
PRÉSENT ?
DIRECTION : Danièle ANDRÉ, Daniel TRON,
Aurélie VILLERS
ARGUMENT :
La science-fiction serait-elle moribonde? Elle est moins populaire que
la Fantasy. Mais surtout, elle peine à se renouveler, tant du
point de vue du contenu que de la forme (rien de bien nouveau depuis le
Cyberpunk ou le Steampunk, oubliées les expérimentations d’un Ballard
ou d’un Dick). L’avenir du genre
sera-t-il assuré?
Ce colloque tente de dresser un constat de l’état de la SF
contemporaine en abordant, sans exclusive, tout en favorisant une
approche pluridisciplinaire, les interrogations suivantes. La SF
peut-elle prolonger son existence en rejouant de vieux mythes dans des
contextes futuristes? Peut-elle trouver des sources de régénération
dans de nouveaux supports et/ou dans des civilisations ou aires
géographiques autres que celles qui ont produit les chefs-d’œuvre de
son âge d’or? Comment le processus d’hybridation avec d’autres genres
l’a-t-elle transformée? D’où proviennent les nouveaux modèles?
L’hybridation est-elle le signe d’un renouveau ou au contraire le
symptôme d’une crise
profonde?
CALENDRIER DÉFINITIF :
Lundi 20 juillet
Après-midi:
ACCUEIL DES PARTICIPANTS
Soirée:
Présentation du Centre, des colloques et des participants
Mardi 21 juillet
Matin:
Roger BOZZETTO: Crises dans
l'univers de la SF?
Isabelle LIMOUSIN:
Installation, science-fiction et utopie: l’autre monde de Dominique
Gonzalez-Foerster
Après-midi:
Yann CALVET:
C'était demain...
Isabelle CASTA:
Quand les raisons de craindre sont les raisons d’espérer: l’hypothèse
science-fictive
Mercredi 22 juillet
Matin:
Isabelle PERIER:
Dan Simmons ou "Que se passe-t-il lorsque la science-fiction rêve de
littérature?"
Jérôme DUTEL: Evaluation et
évolution de la science-fiction contemporaine à travers Lupus
(2002-2006) de Frederik Peeters
Après-midi:
Natacha VAS-DEYRES: Quand
l'utopie s'éveillera dans la science-fiction française contemporaine
Yannick RUMPALA: Ente
anticipation et problématisation: la science-fiction comme avant-garde
Jeudi 23 juillet
Matin:
Sylvie A. ALLOUCHE:
Prolégomènes à toute science-fiction future
qui voudra se présenter comme science
Marc ATALLAH: Pour une "esthétique
de l’inversion structurelle": l’avenir n’est sombre qu’en regard d’un
présent aveugle
Après-midi:
DÉTENTE
Vendredi 24 juillet
Matin:
Thierry JANDROK:
Whitley Strieber: dogmatisme ou science-fiction?
Juan Ignacio MUNOZ: Le cyberpunk
vernaculaire de l’Amérique Latine:
dystopies, virtualités
Après-midi:
Claude ECKEN: La science-fiction se dilue-t-elle dans le
présent?
Lauric GUILLAUD & Thierry JANDROK: Le mythe des
Extra-terrestres
Lecture de Claude ECKEN: Etat des lieux de la science-fiction
au XXIème siècle
Samedi 25 juillet
Matin:
Sylvie BÉRARD: L’univers science-fictif d’Elisabeth Vonarburg
ou la mise en scène du rêve
Margaret GALVAN:
"To Boldly Go Where No Man... Exists": enquête sur la liberté
grandissante des femmes en science-fiction
Après-midi:
Anne BESSON: La science-fiction
dans la culture de masse contemporaine: un monde à part?
Conférence performative de Mael LE MÉE:
L'Institut Benway
Dimanche 26 juillet
Matin:
Table Ronde avec Sylvie BÉRARD et Mael LE
MÉE
Maryse PETIT: J.-M. Truong: juste
un temps d'avance
Après-midi:
Anne KUSTRITZ: Eugénisme
postmoderne: l’avenir de la politique reproductive et de la pensée
raciale en science-fiction
Lundi 27 juillet
Matin:
Aurélie VILLERS: Récits analeptiques et distanciation
cognitive temporelle dans la série Lost
Lauric GUILLAUD: Le cycle Indiana
Jones: les limites de l’hybridité générique
Après-midi:
DÉTENTE
Mardi 28 juillet
Matin:
Laura HILTON:
Le futur est dans le passé: la science-fiction gothique contemporaine
dans la bande-dessinée steampunk
Gilles MENEGALDO: La guerre des mondes, trois
variations d'un paradigme
Après-midi:
Carole LIPSYC: Récits variables
Giovanni BERJOLA: Le cinéma japonais contemporain de
science-fiction
Benjamin THOMAS: Le cinéma de
science-fiction japonais et la fonction politique de l'art
Mercredi 29 juillet
Matin:
Adela CORTIJO: Ars et natura
dans le devenir du Cyberpunk. Le bestiaire d'Enki Bilal
Christian CHELEBOURG:
Y’a plus de saisons, ma pauv'dame ! Les écofictions du réchauffement
climatique
Après-midi:
Sophie LÉCOLE-SOLNYCHKINE: Du paysage-image
au faire-paysage, représentations paysagères dans la SF et
paysagisme contemporain
Discussion ecofiction: WALL-E
Jeudi 30 juillet
Matin:
Conclusions
Après-midi:
DÉPART DES PARTICIPANTS
RÉSUMÉS :
Sylvie A. ALLOUCHE: Prolégomènes à
toute science-fiction future qui voudra se présenter comme science
Nous nous proposons de rêver ici la science-fiction comme science, par
l’examen partiellement fictionnel des conditions de possibilité de la
constitution d’une science systématisant la procédure d’exploration
narrative des mondes possibles que nous admettons comme caractéristique
du genre. Partant principalement de trois hypothèses relatives aux
rapports de la science-fiction, des mondes possibles et de la
connaissance, nous y appliquons récursivement la procédure mentionnée
plus haut en la couplant aux concepts de prospective philosophique
tirés des Prolégomènes à toute métaphysique future qui voudra se
présenter comme science de Kant et
d’Histoire et méthodologie des sciences de Lakatos. Le
corpus science-fictionnel est constitué d’œuvres imaginant des
sciences qui satisfont à certains axes du programme ainsi mis en
lumière, comme l’exploration des futurs possibles ou la reliaison
de toutes les sciences, par exemple Fondation d’Isaac Asimov
ou La Faune de l’espace d’A. E. Van Vogt.
Cette communication bénéficie du soutien du Cluster de
recherche ERSTU (Enjeux et représentations de la science, de la
technologie et de leurs usages), mis en place et soutenu par la région
Rhône-Alpes.
Marc ATALLAH: Pour une "esthétique de
l’inversion structurelle": l’avenir n’est sombre qu’en regard d’un
présent aveugle
D’inspiration interdisciplinaire, ma communication aura pour objectif
l’analyse des relations qui se font jour entre le processus — réflexif
— de la conjecture science-fictionnelle et l’imaginaire — prospectif —
de la technoscience: alors que celui-ci dit aujourd’hui en inventant,
ostensiblement, demain, celui-là, écrit demain pour dire,
subrepticement, aujourd’hui. Or, une telle "inversion structurelle" est
la chance — peu étudiée jusqu’à présent — d’une esthétique propre à la
littérature de science-fiction: le cognitive estrangement,
comme l’appelait Darko Suvin,
a par exemple trop souvent été décrit par sa seule
fonction philosophique, au détriment de ses atouts strictement
littéraires — ce qui a de quoi étonner, puisque ce
concept est originellement construit par Bertolt Brecht pour
caractériser l’esthétique propre à son théâtre. Pourtant,
mettre à distance une contemporanéité opaque, c’est
instituer une réflexion et une esthétique novatrices — l’une ne pouvant
être pensée sans l’autre; c’est à l’étude de cette consubstantialité
que je me confronterai
et ce, au travers d’un exemple fédérateur: le roman
d’Andreas Eschbach, Le Dernier de son espèce.
Anne BESSON: La science-fiction dans la
culture de masse contemporaine: un monde à
part?
A partir de deux ouvrages de hard science récemment traduits, le
recueil Axiomatique de Greg Egan et Rainbow’s End de
Vernor Vinge, nous montrerons que la science-fiction, loin d’être
reléguée à une position marginale dans les imaginaires contemporains
par la concurrence de la fantasy, en informe au contraire en
profondeur les représentations. Elle occupe une place centrale dans la
manière dont sont pensés, et décrits, les univers multimédiatiques
proposés à la consommation. Le rêve partagé de notre époque, celui d’un
autre monde qui soit le nôtre, peut en effet y devenir la matière même
de la narration, via l’opération de concrétisation de la métaphore qui
caractérise le genre: prise de drogue ou modifications neurologiques
chez Egan, extension des technologies du virtuel chez Vinge, en
permettent l’exploration, y préparent les esprits...
Roger BOZZETTO: Crises dans l'univers
de la SF?
La crise actuelle de la SF est-elle le dernier sursaut d'un genre
moribond? La fantasy profite du désamour du public pour les effets des
conquêtes de la science et de la
technique, et de leurs effets, que la SF magnifiait. Aujourd'hui
l'ex-public de la SF se focalise sur les aspects de dangerosité
de la science. Le XIXème siècle avait inventé
des formes et des figures neuves pour donner un visage à
sa modernité. C'est le cas avec Frankenstein (1818) ou avec La
machine à explorer le temps (1895). Ces
figures s'ancraient sur le nouvel esprit de la Révolution industrielle.
Cette imagination spéculative existe-t-elle encore chez nos écrivains
de SF? Des espaces neufs sont à inventer, qui semblent faits
d'oxymores: l'écologie industrielle, les démocratures, les
utopies réalistes, etc... Ce sont des réservoirs
d'images à inventer. L'un des atouts de la "fantasy", outre
son socle recyclable, c'est la fluidité et le poétique
de sa narration alors que la SF, est supposée n'être
qu'une "littérature d'idées". Pourtant certains de ses textes offrent
parfois au lecteur une séduction par un usage poétique du langage. Ce
qu'Ursula Le Guin a réussi aussi bien dans l'univers de Terremer
que dans celui de
l'Ekumen par exemple. La crise actuelle de la SF est-elle le dernier
sursaut d'un genre moribond?
Yann CALVET: C'était demain...
Depuis le début des
années 2000, le succès international de films de SF et de Fantasy
montre le retour en force
d’une forme de mentalité magique rémanente dont il est tentant de dire
qu’elle est le contre point d’un rationalisme que le vingtième siècle a
fini par transformer
en une forme supérieure de cynisme. Chaque époque,
chaque période de l’histoire de la SF, adapte ainsi les mêmes histoires
de base à ses préoccupations du moment mais depuis septembre 2001 la SF
est devenu plus sombre, plus critique vis-à-vis de la civilisation
"moderne" capitaliste et des conséquences (sociales, politiques,
climatiques...) de la mondialisation.
Cette communication se proposera de réfléchir sur l’imaginaire
socio-culturel et mythologique de la SF depuis le début du nouveau
millénaire. Quel est le devenir culturel du genre et quel est l’arsenal
d’imaginaire qui l’accompagne et même le signale?
Isabelle CASTA: Quand les raisons de
craindre sont les raisons d’espérer: l’hypothèse science-fictive
Même si l’affirmation peut sembler paradoxale, on peut tout à fait
défendre l’idée que le plus pur écrivain de SF française s’appelle,
aujourd’hui, Michel Houellebecq... car il réunit, en particulier dans Les
Particules élémentaires et dans La Possibilité d’une île,
les ingrédients indispensables à l’élaboration science-fictive: un
récit très charpenté, et l’irruption, à la fois motivée et sidérante,
d’une thèse scientifique inédite, bouleversant l’humanité tout entière
et transformant en profondeur individus et société. Mais l’habillage
habituel de la science-fiction (galaxie lointaine, super-pouvoirs ou
héros surdimensionnés) fait évidemment défaut, tout comme chez l’autre
"grand" de ce début de XXIème siècle, Antoine Volodine. Là, l’imagerie
est encore autre, entre le trash à la "Mad Max" et la désespérance de
Tarkovski ; nous sommes dans la SF utopique, plus exactement
contre-utopique, et les nouveautés sont plus régressives que porteuses
d’un quelconque progrès... La confrontation entre le traitement
littéraire "haut de gamme" de la SF et ses occurrences actuelles les
plus populaires — donc télévisuelles — amène à formuler un certain
nombre d’hypothèses: dans Lost
comme dans The lost room ou Jericho, l’arsenal SF est
toujours au service d’une interrogation éthique, voire eschatologique ;
le temps et l’espace, conditions a priori de toute expérience
sensible, y sont
maltraités, mutants, insaisissables ; les objets, tout comme chez
Houellebecq, y acquièrent (ou y retrouvent?) une dimension salvatrice
et sacrale — la fameuse "clé" de la Lost Room — et le
retournement final ("seul l’amour peut sauver le monde") est
perceptible aussi dans les romans cités: mais c’est sur le mode
"incapacitant"... C’est à partir de ces deux domaines (romans français
versus séries américaines) que j’aimerais construire mon approche ; en
clair: comment le rationalisme laïc français rejoint-il la mystique
américaine d’une "seconde chance" pour le monde? la science fiction
désenchantée de Volodine a-t-elle quelque chose à dire aux errants de Lost?
peut-on subsumer une "construction esthétique" commune, qui permette
d’architecturer l’offre science-fictive? En conclusion, je
m’efforcerais de revenir sur la question des "visualités", en
soulignant combien les échanges entre heroic fantasy et science
fiction sont à la
fois problématiques et prometteurs, et comment l’écriture romanesque
française actuelle (Brussolo, Chattam, Musso, Lévy) apprivoise ces
engrammes et parvient à
les sublimer.
Christian CHELEBOURG: Y’a plus
de saisons, ma pauv'dame ! Les écofictions du réchauffement climatique
L'imaginaire représente le temps selon deux grands schémas, l'un
cyclique ou agrolunaire, l'autre progressiste et messianique. Le rythme
des saisons constitue le modèle du premier; son dérèglement, de quelque
ordre qu'il soit, postule une fin des cycles débouchant sur une réalité
neuve, autrement dit un progrès. De là, sans doute,
le découpage des ères géologiques en tranches volontiers climatiques.
Penser le dérèglement du climat, c'est donc substituer à la pensée
cyclique une pensée progressiste, si sombre soit-elle; c'est aussi
prolonger les angoisses millénaristes de la fin du XXème siècle. Ce
sont les rêveries attachées à cette révélation d'un avenir possible que
je m'efforcerai de cartographier en me
livrant à une synthèse de leurs manifestations tant
en littérature (Storm of the Century de S. King, His Dark
Materials de Ph. Pullman) qu'en BD (SOS Météores, t. VIII
de "Blake et Mortimer") ou en jeu vidéo
(SimCity de Will Wright, 1er épisode), tant que dans les
séries télévisées (K-Ville, Tsunami, Jericho)
que dans le cinéma de fiction (Peut-être de C. Klapisch, The
Day after Tomorrow de R. Emmerich, Twister de J. de Bont, The
Avengers
de J. S. Chechik) ou le documentaire (An Inconvenient Truth
d'Al Gore, Earth d'A. Fothergill). Plusieurs topiques devraient
se dégager: un nouveau complexe de Cassandre prolongeant la vague
millénariste une conception darwinienne de l'homme comme espèce
dépendante de son milieu ; une inversion de l'histoire conduisant du
cosmos au chaos; une représentation du climat comme arme du châtiment,
comme figure de la fatalité, conduisant à une proximité des discours
savant et
religieux sur le sujet. Ce sera l'occasion de confronter la
science-fiction à la science et de constater son adhésion globale au
discours dominant. On verra que ce phénomène induit naturellement une
poétique de l'illustration qui tend à rapprocher
la fiction du documentaire, quitte à les confondre dans un
docu-fiction comme Paris 2011 - La Grande Inondation de Bruno
Portier. Ce faisant, la science-fiction contemporaine tend à
revenir aux sources du genre, puisque cette option était aussi
celle de Jules Verne par exemple. On verra également que la
SF climatique renouvelle les codes de l'héroïsme dans la
mesure où les fictions de la catastrophe écologique remplacent les
traditionnels affrontements entre forces ennemies par une prise de
conscience de la responsabilité humaine invitant tout un chacun à ne
lutter que contre lui-même. La cosmologisation
de l'héroïsme apparaît du même coup indissociable de son
intériorisation. Au fond, le discours scientifique sur le réchauffement
climatique et les presciptions qu'il induit peuvent apparaître comme
une forme de propagation sociale de l'esprit romanesque de la SF: grâce
à eux, l'héroïsme commence avec le tri sélectif des ordures ménagères.
Adela CORTIJO: Ars et natura
dans le devenir du Cyberpunk. Le bestiaire d'Enki
Bilal
Le cyberpunk surgit en tant que réponse à l’imposition extensive de
nouvelles technologies, qui semblaient faciliter la vie quotidienne
mais, qu’en contrepartie, exerçaient un pouvoir de contrôle sur
l’individu. La percussion dans la société des avances scientifiques,
réelles ou imaginaires, est perçue d’une manière négative, nuisible et
sinistre. L’ère cybernétique et les perfectionnements informatiques
produisent des dystopies post-industrielles où prolifèrent les
marginalités sociales. La paranoïa, les limites flous entre le réel et
le virtuel, se déploient dans une ambiance noire, similaire à celle du
hard-boiled
américain. Une science-fiction avec une touche de Chandler
et de Métal Hurlant, que nous analyserons sous l'optique de la bande
dessinée. En concret, sur la présence angoissante d'animaux insolites
dans les univers créés dans les bandes dessinées de Moebius et d’Enki
Bilal.
Jérôme DUTEL: Evaluation et évolution
de la science-fiction contemporaine à travers Lupus (2002-2006)
de Frederik Peeters
A travers le "roman graphique" Lupus (une œuvre nommée en 2004,
2005 et 2006 pour le prix du meilleur album au Festival d’Angoulême
pour ses trois premiers épisodes et élue "Essentiel d’Angoulême" en
2007 pour son dernier volet) de l’auteur suisse Frederik Peeters
(1974-...), il est possible de discerner comment
le médium de la bande dessinée contemporaine peut illustrer aussi bien
la continuité d’une certaine tradition poétique de la science-fiction,
lieu d’évasion et d’imagination, que son renouvellement. A l’intérieur
d’un champ pictural hybride, autant nourri de références littéraires
que cinématographiques, Lupus
est ainsi une œuvre forcément transtextuelle et
intertextuelle où les inspirations formelles et classiques subissent
une déformation empreinte d’originalité
et de nouveauté. Introduisant une dimension éminemment
intime, l’auteur entraîne ainsi la narration de son récit dans une
direction bien particulière où les notions d’influence, de déviation,
d’évolution et de réciprocité deviennent inévitables et inextricables
les unes des autres.
Margaret GALVAN: "To Boldly Go Where
No Man... Exists": enquête sur la liberté grandissante des femmes en
science-fiction
Bien que la science-fiction soit traditionnellement dominée par les
auteurs masculins, c'est également un genre ouvert sur l'exploration de
nouveaux mondes et de nouveaux peuples, éléments qui ont suscité
l'intérêt de nombreuses féministes pour ce genre. En s'appuyant sur une
analyse du genre masculin/féminin, informée par Gender Trouble
de Judith Butler et Female Masculinity de Judith Halberstam,
cette étude va explorer la manière dont les auteurs ont utilisé les
mondes science-fictifs peuplés uniquement de femmes pour problématiser
le concept de genre ("gender") vu comme un système binaire. Ces mondes
aux codes sexués non conventionnels altèrent le sens et la forme que
prennent la sexualité et l'identité. Néanmoins, un système patriarcal
règne toujours sur les étagères des librairies où le domaine de la
science-fiction croule sous le poids des textes produits par des
hommes. Qu'en est-il alors du progrès opéré pour abolir cette idée
fausse de la binarité du genre ("gender"), si l'on considère que les
progrès reconnaissables dans les textes ne sont pas nécessairement
transférés dans le monde "réel"?
Références Bibliographiques :
Butler, Judith, "Monique Wittig: Bodily Disintegration and Fictive
Sex". Gender Trouble: Feminism and the Subversion of Identity.
New York: Routledge, 1999. 141-162.
Crowder, Diane G, "Universalizing Materialist Feminism", On Monique
Wittig: Theoretical, Political, and Literary Essays. Ed. Namascar
Shaktini. Urbana: University of Illinois P, 2005. 63-86.
De Beauvoir, Simone. Le Deuxième Sexe. Paris: Gallimard, 1949.
Donaweth, Jane L., and Carol A. Kolmerten, eds. Utopian and Science
Fiction by Women : Worlds of
Difference. 1st ed. Syracuse: Syracuse UP, 1994.
Griffith, Nicola. Ammonite. New York: Ballatine Books, 2002.
Halberstam, Judith. Female Masculinity. Durham: Duke UP, 1998.
Hollinger, Veronica, "(Re)reading Queerly; Science Fiction, Feminism,
and the Defamiliarization of Gender", Future Females, the Next
Generation: New Voices and Velocities in Feminist Science Fiction
Criticism. Ed. Marleen S. Barr. Lanham: Rowman & Littlefield,
2000. 197-218.
Jagose, Annamari, "Lesbians Are Everywhere", Lesbian Utopics.
New York: Routledge, 1994. 1-24.
This text investigates lesbians through literary theory and
continues on the footsteps of Butler.
James, Edward, "Utopias and Anti-Utopias", The Cambridge Companion
to Science Fiction. Ed. Farah Mendlesohn and Edward James.
Cambridge: Cambridge UP, 2003.
219-229.
Larbalestier, Justine, "Absence or Presence", The Battle of the
Sexes in Science Fiction. Middletown: Wesleyan Up, 2002. 152-163.
Larbalestier, Justine, Daughters of Earth: Feminist Science Fiction
in the Twentieth Century. Middletown: Wesleyan UP, 2006.
Pearson, Carol, "Women's Fantasies and Feminist Utopias", Frontiers
2 (1977).
Russ, Joanna, "Recent Feminist Utopias", To Write Like a Woman:
Essays in Feminism and Science
Fiction. Bloomington: Indiana UP, 1995.
Russ, Joanna, The Female Man. Boston: Beacon P, 1986.
Russ, Joanna, "What Can a Heroine Do? or
Why Women Can't Write", To Write Like a Woman: Essays
in Feminism and Science Fiction. Bloomington: Indiana UP,
1995.
Suvin, Darko, "Defining the Literary Genre of Utopia: Some Historical
Semantics, Some Geneology, a Proposal and a Plea", Studies in the
Literature of the Imagination 6, n°2 (Fall 1973): 121-45.
Suvin, Darko, Metamorphoses of Science Fiction: On the Poetics and
History of a Literary Genre. New Haven: Yale UP, 1979.
Wittig, Monique, Les guérillères. Paris: Les Éditions de
Minuit, 1969.
Wittig, Monique, Les guérillères. Trans. David Le Vay. New
York: Viking P, 1971.
Wittig, Monique, "Some Remarks on Les
guérillères", On Monique Wittig: Theoretical,
Political, and Literary Essays. Ed. Namascar Shaktini.
Urbana: University of Illinois P, 2005. 37-43.
Wittig, Monique, "One Is Not Born a Woman", The Straight Mind and
Other Essays. Boston: Beacon P, 1992. 9-20.
Lauric GUILLAUD: Le cycle Indiana
Jones: les limites de l’hybridité générique
Dans le quatrième volet de sa série, Indiana Jones et le Royaume du
Crâne de Cristal (2008), Spielberg reprend les ingrédients
habituels de la saga, en y ajoutant le thème de "l'archéologie
fantastique" des années 60-70 ("l'archéologie spatiale"). Cette
régression thématique nous conduit à questionner le devenir
de la science-fiction à travers le recyclage cinématographique
d’éléments hétéroclites appartenant à la BD (Tintin, Black et
Mortimer), au
cinéma des années 30 (Tarzan), à la (sous-)culture pop des
années 50, aux séries TV contemporaines (X-Files), à la fantasy,
à l’ufologie (Roswell, Zone 51), à la mythologie sud-américaine
(L’Eldorado), à l’ésotérisme (Arche d’Alliance, quête du Graal) et à la
parascience. La nostalgie d’un âge d’or de la SF, la frénésie
d’hybridité générique (horreur, fantastique, anticipation, mondes
perdus) sont-ils l’indice d’un cul-de-sac du cinéma de SF, ou au
contraire d’une volonté de retrouver les origines mêmes de
l’inspiration: le mythe? Pour retrouver son originalité, la SF,
confrontée au retour de l’irrationnel, est-elle nécessairement
condamnée à verser dans une quelconque "nostalgie des origines"?
Notre communication, largement fondée sur l’anthropologie culturelle,
tentera de formuler des réponses à ces questions en s’intéressant au
cycle de Spielberg.
Références Bibliiographiques :
W. Stoczkowski, Des hommes, des dieux et des extraterrestres,
Paris, Flammarion, 1999.
Indiana Jones et le Royaume du Crâne de Cristal, Paris,
Hachette Livre, 2008.
Laura HILTON: Le futur est dans le
passé: la science-fiction gothique contemporaine dans la bande-dessinée
steampunk
"Les idées du passé, qui sont les denrées les plus précieuses
du passé, sont encore parfaitement à notre portée... il est possible
d’entendre le passé comme un moyen de progresser
dans le futur" (Extrait d’une interview d’Alan Moore dans SteamPunk
Magazine)
Mon étude portera sur les différents volumes de La Ligue des
Gentlemen Extraordinaires
d’Alan Moore et Kevin O’Neill. Je commencerai par évoquer la nature
hybride et oxymorique de la science-fiction gothique ainsi que son lien
avec la littérature Steampunk, en démontrant que, malgré des
déplacements dans le temps et l’espace, la Ligue présente une
histoire cohérente centrée sur l’ère Victorienne. En lien avec la
notion
gothique d’identité fragmentée ou double et la notion d’"ab-humain"
proposée par Kelly Hurley, j’explorerai dans un second
temps la façon dont Moore réinterprète les
personnages de Griffin et de Hyde, en faisant des "super-héros"
steampunk. Je conclurai enfin par l’analyse du meurtre de Griffin
par Hyde, une scène qui incarne parfaitement le concept de
l’énigme science-fictive. Mon analyse repose, dans son ensemble, sur
l’idée que la Ligue présente l’avenir du Steampunk comme
inexorablement lié à la littérature du passé.
Thierry JANDROK: Whitley Strieber:
dogmatisme ou science-fiction?
Depuis les années
cinquante, la population et les autorités furent
régulièrement alertées par des témoignages concernant des OVNI. Puis
vinrent les histoires d’enlèvement et de tortures hyper technologiques.
Surfant sur cette vague
ufologique, Whitley Strieber raconta son propre enlèvement par
des extra-terrestres. Devant la vague d’incrédulité de la communauté
scientifique et littéraire, il poursuivit sa démarche de "révélations"
avant de publier une fiction en 2006: The Grays. Comment situer
une telle approche dans la science-fiction d’aujourd’hui? Les histoires
d’invasion par des aliens annoncerait-elles une remise en question des
bases de la science-fiction? Quand la science se rapproche de la magie,
le seul recours serait-il de revenir à l’exposé iconique et
fictionalisé du dogme judéo-romano-christiannique, plongeant ainsi
l’aventure de l’anticipation scientifique et de ses lumières dans
l’obscurité de croyances appelées à répondre aux angoisses de nos
contemporains?
Références Bibliographiques :
Friedman S.T.: Operation Majestic 12 and the United Government’s UFO
cover up, Marlow and Company, New York, 2005.
Leir, Roger: Alien Implants, Dell Books, New York, 2000.
Strieber Whitley: Communion a true story, Harper, New York,
1987.
Strieber Whitley: Majestic, Putnam Books, New York, 1989.
Strieber Whitley: Confirmation, St martin’s Press, 1998.
Strieber Whitley: Breakthrough: The Next Step, Harper
Spotlight, New York, 1996.
Anne KUSTRITZ: Eugénisme postmoderne:
l’avenir de la politique reproductive et de la pensée raciale en
science-fiction
Ce travail analyse les images de l’appartenance raciale, de la
naissance et de l’humanité telles qu’elles sont construites par un
ensemble de récits de Fantasy et de science-fiction contemporains. Les
livres, films et séries télévisées de science-fiction qui construisent
métaphoriquement des systèmes fondés sur les races rejouent avec
insistance les leçons et les catastrophes du passé, en instaurant un
dialogue avec les choix
politiques cruciaux de notre époque qui président à des œuvres
culturelles clés en construisant
un espace imaginaire suffisamment éloigné des agissements de la culture
officielle afin de mettre à jour la rétention des contenus raciaux et
eugéniques dans les inquiétudes contemporaines liées à la génétique.
Ainsi, ces récits nous obligent à affronter les implications des
politiques humaines et reproductives dans un monde de manipulation
génétique croissante, et attirent notre attention sur les questions
morales essentielles de chaque époque: qui est l’Autre, et comment
construire une relation éthique avec l’Altérité?
Références Bibliographiques :
Berlant, Lauren. The Anatomy of National Fantasy: Hawthorne,
Utopia, and Everyday Life. Chicago: University of Chicago
Press, 1991.
Berlant, Lauren. The Queen of America Goes to Washington City:
Essays on Sex and Citizenship. Durham, NC: Duke University Press,
1997.
Cohn, Jan. Romance and the Erotics of Property. Durham: Duke
University Press, 1988.
Frank, Thomas. "Alternative to What". Commodify Your Dissent.
Ed. Thomas Frank and Matt Weiland. New York: W.W.
Norton & Company, 1997.
Gaonkar, Dilip Parameshwar. "Toward New Imaginaries: An Introduction". Public
Culture 14.1 (2002): 1-19.
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Ethics of Queer Life. New York: The Free Press,
1999.
Sophie LÉCOLE-SOLNYCHKINE: Du paysage-image
au faire-paysage, représentations paysagères dans la SF et
paysagisme contemporain
Comment les représentations du paysage dans la SF influencent-elles et
travaillent-elles le chantier paysager de notre quotidien? Si le
paysage-fiction des films semble se rapprocher peu à peu de notre
entourage immédiat, l’analyse comparative de productions des deux
ordres — paysages emblématiques de la SF, réalisations urbanistiques
d’architectes-paysagistes —
permettra de dessiner le parcours d’allers-retours incessants croisant
influences et parentés. Cette analyse permettra en outre
d’apporter un éclairage nouveau aux notions de fiction
et de paysage, mettant au jour leurs relations sous-jacentes. Si le mot
paysage désigne tout autant les représentations de paysage que
le paysage grandeur nature, alors cette indistinction fondamentale
permet de penser que le paysage réel et le paysage-image ont partie
liée: non seulement parce que, banalement, l’un représente l’autre,
mais, plus essentiellement, car la nature même de l’un participe de
celle de l’autre. Cette perspective met ainsi au jour un enjeu
politique de taille, qui réunit dans une même praxis les réalisateurs
de SF et les architectes-paysagistes: celui, à travers la fabrication
du paysage, de la recherche d’un comment-vivre-ensemble.
Mael LE MÉE: L'institut Benway
Il ne s'agit pas d'une communication universitaire mais d'une
conférence-fiction sur une entreprise fictive, l'Institut Benway. Je
développe le projet Benway depuis
quatre ans. Il a été accueilli et soutenu dans les champs de la culture
scientifique, des recherches universitaires en sciences humaines
(CNRS/Paris 3, Grenoble, Bordeaux, Dijon), de la
science-fiction et de l'art contemporain. La dernière présentation
des conférences Benway a eu lieu au musée d'histoire
des sciences de Genève, les 5 et 6 juillet derniers. Les organes
de confort Benway ont été vendus notamment au Palais de Tokyo à Paris
et au Lieu Unique à Nantes.
L'Institut Benway est un projet de science-fiction travaillant à partir
d'images d'archives des années
50, sur les enjeux biotechnologiques, dans des formes hybrides:
performance, installation, audiovisuel, graphisme, littérature.
C'est un travail prospectif dans ses thématiques comme
dans ses formes. Une tentative de proposer au public l'expérience d'une
nouvelle incarnation.
Isabelle LIMOUSIN: Installation,
science-fiction et utopie: l’autre monde de Dominique Gonzalez-Foerster
Les artistes nés dans les années 60 ont grandi dans les années
science-fiction, marquées notamment par la sortie de 2001 Odyssée
de l’espace (1968) et de Star wars (1977). Alors que,
trente ans plus tard, la SF semble s’épuiser dans ses formes classiques
(littérature, bande dessinée, cinéma ou design), l’art des années 90 à
nos jours y renouvelle ses sources d’inspiration Nous proposons de nous
intéresser à l’œuvre de Dominique Gonzalez-Foerster, artiste française
née en 1965 à Strasbourg. Exploratrice des mondes possibles, celle-ci
conçoit installations et expositions comme autant de propositions
artistiques dont l’enchantement parfois féérique a la douceur d’une
aventure mémorielle. L’influence de la science fiction, revendiquée par
l’artiste, est majeure dans son œuvre, comme en a témoigné l’exposition
"Expodrome" organisée au Musée d’art moderne de la ville de Paris au
printemps 2007. Il s’agira pour nous d’examiner quelles sont les
inspirations science-fictives de cette artiste, et par quelles voies
celles-ci resurgissent dans son œuvre, mêlant essentiellement arts
plastiques, cinéma, littérature, musique et transformant dans le même
mouvement, au-delà des classifications classiques et des cloisonnements
génériques, l’art et la science fiction d’aujourd’hui.
Juan Ignacio MUNOZ: Le cyberpunk
vernaculaire de l’Amérique Latine: dystopies, virtualités
Plutôt qu’en mouvement cohérent, le cyberpunk latino-américain s’est
constitué en une série de vagues dissociées apparaissant vers la fin
des années 1980 avec le démantèlement des dictatures militaires et
l’accélération des projets économiques néolibéraux dans la pluralité
des pays latino-américains: de l’Argentine jusqu’au Mexique, en passant
par Cuba, le Paraguay et la Bolivie. À partir d’une exposition des
traits saillants de ce sous-genre, à mi-chemin entre le réalisme
magique, le roman de dictateur, l’écriture postmoderne et la
science-fiction, je ferai un survol de
ses principales œuvres: Santa Clara Poltergeist (1991)
du Brésilien Fausto Fawcett, La Primera Calle de la Soledad
(1993) du Mexicain Gerardo Horacio Porcayo, et Ygdrasil
(2005) du Chilien Jorge Baradit. Je m’attarderai également à évaluer
comment les concepts de dystopie et de réalité virtuelle sont articulés
dans cet espace culturel.
Isabelle PERIER: Dan Simmons
ou "Que se passe-t-il lorsque la science-fiction rêve de littérature?"
Le propos de cette intervention consistera à analyser les deux
cycles de science-fiction de Dan Simmons en les passant au crible de
l'intertextualité. Ainsi, si Dan
Simmons reprend un intertexte traditionnel en science-fiction,
c'est-à-dire un entremêlement de discours scientifiques, de littérature
de science-fiction et de grands mythes épistémologiques, son
originalité vient de l'adjonction d'un intertexte appartenant à la
littérature officielle, ou dominante, ainsi qu'à la littérature
critique. De cette manière, Dan Simmons ouvre une double piste de
développement possible pour la
science-fiction. D'une part, loin de laisser ces deux types
d'intertexte
cohabiter individuellement, il les tisse en un texte dont l'originalité
réside proprement dans cet entremêlement de références intertextuelles
hétéroclites. D'autre part, cette
intertextualité fortement littéraire et culturelle se trouve
être à même de questionner les rapports souvent
occultés de la culture avec le futur et la technoscience.
Maryse PETIT: J.-M. Truong: juste un
temps d'avance
Auteur de trois romans, J.-M. Truong n’est pas un écrivain
d’anticipation. Philosophe et psychologue, expert spécialiste en
intelligence artificielle, créateur d’entreprises de haute technologie,
J.-M. Truong n’est pas un homme du présent. D’origine
franco-vietnamienne, vivant et travaillant en Chine, J.-M. Truong n’est
pas d’un pays, mais un esprit des frontières; frontières entre
aujourd’hui et demain, entre homme et machine dotée de réflexion, entre
humanité et déshumanisation. Qu’il s’interroge sur le devenir du
clonage, sur l’empire de la Toile ou sur notre rapport au temps en
proposant les conséquences prochaines des découvertes scientifiques
actuelles en matière de technologie de l’information et de biologie,
Truong pose les questions essentielles des limites, que l’on croirait
insurpassables, et qui sont chaque jour franchies. Au-delà des
cellules, des écrans, des frontières, quels sont les possibles pour une
humanité aveugle et qui a tellement envie de croire aux leurres qu’elle
se fabrique? Si les réponses qu’apporte l’auteur sont loin d’être
optimistes, il n’en demeure pas moins que c’est
à la réalisation de quelques-unes d’entre elles que nous sommes
d’ores et déjà confrontés dans le présent.
Yannick RUMPALA: Ente anticipation
et problématisation: la science-fiction comme avant-garde
La littérature de science-fiction n’a pas qu’une dimension narrative.
Par ses montages spéculatifs, elle peut être un support et un vecteur
de réflexivité collective. Elle peut aussi contribuer à préparer les
esprits en participant à la construction et à la diffusion d’images du
futur. Cette contribution part ainsi de l’hypothèse que la
science-fiction représente une façon de ressaisir le vaste enjeu du
changement social, et derrière lui celui de ses conséquences et de leur
éventuelle maîtrise. La science-fiction offre, certes plus ou moins
facilement, des terrains et des procédés pour s’exprimer sur des
mutations plus ou moins profondes, plus précisément sur les
trajectoires qu’elles semblent pouvoir prendre. En considérant cette
forme d’expression artistique comme un travail de problématisation,
nous essaierons donc
d’examiner comment l’appréhension du changement social est travaillée
par cette médiation littéraire. Ce lien entre l’expression artistique
et ses potentiels prolongements socio-politiques sera mis à l’épreuve à
partir de l’exploration de courants généralement considérés comme
porteurs de positions engagées (cyberpunk et postcyberpunk, biopunk,
fiction spéculative, anticipation sociale...).
Benjamin THOMAS: Le Cinéma de
science-fiction japonais et la fonction politique de l'art
Au Japon, l’historiographie et la politique offrent aujourd’hui un
terrain miné à l’examen critique du passé. Ce "simple" projet provoque
immanquablement dans ces domaines des tensions qui finissent par
reléguer son objet au second plan.
Certains cinéastes japonais, parce qu’ils sont sensibles aux dangers de
la prolifération de l’image, interrogent quant à eux jusqu’à la
possibilité de parler d’histoire par le biais de la forme canonique du
film de fiction: l’histoire ainsi évoquée risquerait d’être
"déréalisée".
Dans un tel contexte, des réalisateurs tels que Hiroki Yamaguchi
semblent pourtant avoir trouvé
dans la science-fiction la possibilité de livrer un discours historique
conscient en ne frappant pas de suspicion la fiction et les jeux
d’immersion qui président à sa forme traditionnelle.
Ce genre, lié avant tout au divertissement — qui reprendrait ici le
sens positif que lui donnait W.
Benjamin —, semble permettre de redécouvrir, au cœur
de l’ère de la surabondance médiatique, grâce au "détour", à
"l’échappée", une forme de ce que le penseur allemand appela la
"fonction politique" du cinéma.
Natacha VAS-DEYRES: Quand
l'utopie s'éveillera dans la science-fiction française contemporaine
Dans la science-fiction française contemporaine nombre de romans
conjecturaux comme ceux de Serge Lehman, de Jean-Christophe Rufin, de
Jérôme Leroy, de Pierre Bordage, d'Ayerdhal ou encore de Maurice G.
Dantec ont choisi la dimension littéraire de la dystopie pour
questionner notre futur social et politique. Ces représentations
prospectives de notre société postmoderne, endroit fictionnel d'un
monde libéral et mondialisé, semblent avoir gommé toute tentative
utopique. Pourtant au sein même de ces univers globalisés, ou la
logique mercantile prime sur les valeurs humaines, l'utopie est bien
présente. En réécrivant et en bousculant notre histoire par un
phénomène d'écho entre invention
littéraire et référence au réel, la nouvelle génération d'écrivains
français de science-fiction témoigne d'un désir profond
de changement sociétal. L'alternative utopique se réalise aujourd'hui
au sein même de la littérature de science-fiction sur l'image positive
d'un monde souhaitable, renouvelé par
des dimensions politiques ou mystiques: elle rompt avec les projets
totalitaires ou consuméristes en explorant les utopies
"en friche", l'envers de ses propres représentations.
Références Bibliographiques :
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Vauvert, Vauvert, 2003 ; Demain une oasis, édition Fleuve noir
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2, 3, 4, 5, Paris, 2000 ; La Trilogie des prophéties (L’Evangile du
serpent, L'Ange de l'abîme, Les Chemins de Damas), Au diable
vauvert, Vauvert, 2004-2005 ; Wang 1-Les Portes d'Occident et Wang
2-Les aigles d'Orient, Librairie L'Atalante, Paris, 1997.
Maurice G. Dantec, Cosmos incorporated, Grande Jonction, Albin
Michel, Paris, 2005-2006.
Serge Lehman, Nulle part à Livérion in Genèses, sous la
responsabilité d'Ayerdhal, J'ai lu SF, Paris, 1996 ; F.A.U.S.T, Les
Défenseurs, Tonnerre Lointain, éditions Fleuve noir, sous la
direction de Jacques Baudou, Paris, 1995-1996.
Jérôme Leroy, Big Sister, éditions Mille et une nuit, Paris,
2004.
Pierre Pelot, Parabellum Tango, Présence du futur, éditions
Denoël, Paris, 2000.
Jean-Christophe Rufin, Globalia, Gallimard, Paris, 2004.
Les Horizons divergents, La grande anthologie de la
science-fiction française (1985-1996), éditions du Livre de Poche,
Paris, 1999.
Les Passeurs de millénaires, La grande anthologie de la
science-fiction française (1950-2000), éditions du Livre de Poche,
Paris, 2005.
Dictionnaires des utopies, Michèle Riot-Sarcey, Thomas Bouchet
et Antoine Picon, Collection les référents, Larousse, Paris, 2002.
L'Utopie, Roger-Michel Allemand, Ellipses, Paris, 2005.
Utopie, la quête de la société idéale en Occident, sous la
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* "Récits des premiers jours du colloque — Différentes
approches pour cerner le genre", par Claire CORNILLON, in L'intermède (26/07/2009)
* "Récits des trois jours suivants — L’espace du rêve",
par Claire CORNILLON, in L'intermède (28/07/2009)
* "Récit des derniers jours — Formes hybrides", par Claire CORNILLON, in L'intermède (31/07/2009)
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