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CENTRE CULTUREL INTERNATIONAL DE CERISY

Programme 2013 : un des colloques







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LA CONSISTANCE DES ÊTRES COLLECTIFS

ÉCHANGES PRAGMATIQUES ET ENJEUX ÉPISTÉMOLOGIQUES


DU LUNDI 10 JUIN (19 H) AU LUNDI 17 JUIN (14 H) 2013

DIRECTION : Jean-Noël FERRIÉ, Virginie TOURNAY, Julien WEISBEIN

ARGUMENT :

En braquant le projecteur sur l'analyse des actes en situation sans recourir à des principes explicatifs englobants ou à des variables indépendantes, les sociologies de l'action posent un défi épistémologique majeur: la dimension explicative est-elle réductible à une simple description des faits observés?

Pour alimenter cette discussion épistémologique, la question des êtres collectifs sera abordée (communautés animales ou humaines, mobilisations, Union Européenne, controverses internationales) avec pour objectif de discuter leur "consistance", de chercher à comprendre comment notre perception de l'environnement nous conduit à concevoir l'existence de collectifs intégrés dotés d'une intentionnalité, d'objectifs bien précis et marqués par une continuité dynamique permettant de fixer les enchaînements causaux et d'en retracer l'histoire.

L'enjeu est double. Il s'agit tout autant de discuter la façon dont un observateur de la vie sociale attribue une intentionnalité et certaines déterminations à des collectifs que de débattre de la façon dont l'analyste est amené à les restituer. Trois paramètres de cette consistance seront discutés: l'intentionnalité prêtée aux collectifs, la construction du récit historique (enchaînements causaux) et l'idée de changement (par exemple, imposition/résistance à une norme).

CALENDRIER DÉFINITIF :

Lundi 10 juin
Après-midi:
ACCUEIL DES PARTICIPANTS

Soirée:
Présentation du Centre, des colloques et des participants


Mardi 11 juin
Animaux
Matin:
Jean-Noël FERRIÉ, Virginie TOURNAY & Julien WEISBEIN: Ouverture
Catherine RÉMY: Quand l'animal fait et fait faire. Pourquoi étudier l'attribution d'intentionnalités aux animaux dans les situations sociales?

Après-midi:
Coralie MOUNET: Connaître par traces: le suivi des loups en France (communication élaborée avec Isabelle MAUZ)
Dominique GUILLO: Les sociétés animales: apports croisés des sciences de la vie et des sciences sociales
Denis LABORDE: Création musicale et permanences culturelles dans un monde globalisé


Mercredi 12 juin
Enrôlements et possessions
Matin:
Didier DEBAISE: Un univers de possessions. L'approche spéculative des sociétés
Frédéric FOREST: Comment concevoir un sujet sans inconscient, un inconscient sans sujet?

Après-midi:
Jean-Louis GENARD: Intentionnalités, capacités et politique publique
Guy SAEZ: La "bonne volonté" culturelle. Institutionnalisation des représentations et retournement des intentionnalités


Jeudi 13 juin
Environnement
Matin:
Geoffrey BOWKER: Where and When is Biodiversity Discourse?
Anne TRICOT: La perception sensible de l’environnement. Petite discussion autour de concepts et méthodes menés dans le cadre d’une recherche interdisciplinaire

Après-midi:
DÉTENTE


Vendredi 14 juin
Intentionnalités et (co)existence des mondes
Matin:
Du vécu singulier à l'expérience des êtres collectifs
Jacques LOLIVE: La fabrication controversée des collectifs du fleuve Var
Virginie TOURNAY: Les êtres collectifs, mode d'emploi

Après-midi:
Janine BARBOT: Penser la place des victimes au procès pénal (communication élaborée avec Nicolas DODIER)

Soirée:
Projection: Le Sacre du printemps de Stravinsky (29 mai 1913) dans une chorégraphie de Pina Bausch (3 décembre 1975)


Samedi 15 juin
Êtres et mondes partagés
Matin:
Annette LEIBING: Des réalités co-existantes: la consistance d'une procédure expérimentale dans le domaine médical
Jean-Noël FERRIÉ: Dieu et les croyants. Un être divin peut-il être adoré par un être collectif?

Après-midi:
Antoine DORÉ: Le public, l’individu et l’expérience des mondes (en) communs: lire Dewey au prisme d’une controverse environnementale
Fabrizio CANTELLI: De la Banque Mondiale au "Black Power": comment écrire les visages de l’empowerment?


Dimanche 16 juin
Institutions européennes et comparaisons internationales
Matin:
Julien WEISBEIN: L'Europe par en bas. Ou comment réinterpréter certaines notions des European studies: européanisation, gouvernance multi-niveaux, société civile européenne
Yann BÉRARD: Micropolitique de l'Union européenne: dans les plis du gouvernement à distance

Après-midi:
Expérimenter la ville
Guy SAEZ: Le conte des trois villes ou l'(in)consistance culturelle de la métropole
Elisa CHELLE: L'institutionnalisation de l'aide sociale en France et aux Etats-Unis. Un jeu à trois êtres collectifs: la bureaucratie, les pauvres, l'opinion publique


Lundi 17 juin
DÉPARTS

RÉSUMÉS :

Yann BÉRARD: Micropolitique de l'Union européenne: dans les plis du gouvernement à distance
Micropolitique n’est pas synonyme de politique locale, ni même d’agir localement: chez Gilles Deleuze et Félix Guattari, l’adjectif désigne ce qui fait à la fois coupure et couture avec l’horizon politique, selon des modalités d’assemblage dont il revient essentiellement aux "centres de pouvoir" d’assurer la coordination et le contrôle. Transposée à la catégorie des objets institutionnels tels que l’Union européenne, l’entrée micropolitique conduit à prendre au sérieux le travail des associations et l’inscription inaugurale des possibilités d’agir sur le monde à distance qui siéent aux réseaux sociotechniques. À partir d’une enquête ethnographique dans deux bureaux d’études, cette communication explore et interroge l’hypothèse d’un lien consistant entre le fait de "bien gouverner" à l’échelle européenne et la mobilisation d’une ingénierie de services moderne, intervenant auprès des services de l’administration communautaire.

Yann Bérard est maître de conférences en science politique à l’Université des Antilles et de la Guyane et membre du Centre de recherche sur les pouvoirs locaux dans la Caraïbe (UMR 8053).
Publications
Yann Bérard, Renaud Crespin (dir.), Aux frontières de l’expertise. Dialogues entre savoirs et pouvoirs (préface de Jean-Yves Trépos), Rennes, PU de Rennes, coll. "Res Publica", 2010, 277 p.

Yann Bérard, "Rendre visible l’existence d’un pouvoir à distance. Esquisse d’une sociologie pragmatique du CV d’expert appliquée à l’UE", dans Fabrizio Cantelli, Marta Roca i Escoda, Joan Stavo Debauge, Luca Pattaroni (dir.), Sensibilités pragmatiques. Enquêter sur l’action publique, Bruxelles, P.I.E. Peter Lang, coll. "Action publique", 2009, p. 375-397.

Fabrizio CANTELLI: De la Banque Mondiale au "Black Power": comment écrire les visages de l’empowerment?
Peut-on considérer l’empowerment comme une catégorie dotée d’une existence propre? Comment l’enquêteur peut-il décrire l’empowerment? Comment saisir à la fois la diversité d’acteurs, d’institutions et d’argumentaires qui s’emparent de cette catégorie tout en considérant la grande variété des échelles temporelles qui sont concernées? Il s’agit ici de questionner les outils et méthodes permettant d’étudier les types de capacités et la définition des pouvoirs en jeu quand il est question d’empowerment et leurs manières de se fixer plus ou moins durablement dans la vie politique et dans le paysage institutionnel. Cette contribution prend appui sur une enquête portant sur les visages plus gestionnaires de l’empowerment (Banque mondiale, fondations européennes) et sur les visages plus civiques de l’empowerment (black power, mouvements sociaux des années 1960-1970 aux Etats-Unis).

Fabrizio Cantelli coordonne la Ligue des Usagers des Services de Santé. Maître de conférences à l’Université libre de Bruxelles et membre du Groupe de Recherche sur l’Action Publique, il est chercheur associé au PACTE-CNRS (IEP de Grenoble). Ses recherches portent sur les transformations de l’action publique et sur la participation citoyenne dans le domaine de la santé. Depuis quelques années, il conduit une étude sur la catégorie d’empowerment, invitant à une relecture des questions liées aux capacités et au pouvoir.
Publications
L’Etat à tâtons. Pragmatique de l’action publique face au sida, PIE Peter Lang, 2007.
"Towards Democratic Governance of Uncertainty? Contesting notions of Participation, Control and Accountability", Journal of Risk Research, 2011 (avec N. Kodate et K. Krieger).
Sensibilités pragmatiques. Enquêter sur l’action publique, PIE Peter Lang, 2009 (avec M. Roca, J. Stavo-Debauge et L. Pattaroni).
Action publique et subjectivité, LGDJ, 2007 (avec J-L. Genard).
Les constructions de l’action publique, L’Harmattan, 2007 (avec J-L. Genard, S. Jacob et C. De Visscher).


Elisa CHELLE: L'institutionnalisation de l'aide sociale en France et aux Etats-Unis. Un jeu à trois êtres collectifs: la bureaucratie, les pauvres, l'opinion publique
L’action publique suppose la construction d’êtres collectifs. Là où leur désignation nominale leur donne une unité apparente ("la bureaucratie", "les pauvres"), leur analyse fait ressortir divisions, fractures et jeux politiques. En matière d’aide sociale, les rôles semblent clairement définis. La bureaucratie délivre, les pauvres reçoivent, l’opinion publique arbitre. Sauf qu’avec la conditionnalité croissante attachée à l’octroi des subsides sociaux, ces interventions et interrelations se complexifient. L’administration se livre à des opérations de sélection et de vérification, les bénéficiaires doivent prouver leur "bonne volonté" pour être intégrés, le tribunal de l’opinion se prononce en faveur de l’application de certaines valeurs morales. Le regard comparé entre la France et les Etats-Unis met en lumière une série de contrastes heuristiques: Etat-providence et delegated welfare state, collectivités locales et organisations communautaires, argent public et dollars philanthropiques. Cette contribution reviendra sur les modes d’institutionnalisation de l’aide sociale qui en découlent, sans négliger l’importance du leadership politique qui les rend possibles.

Elisa Chelle est docteur en science politique et enseignant-chercheur à Sciences Po Grenoble (laboratoire PACTE). Spécialiste des politiques incitatives, ses travaux portent sur la lutte contre la pauvreté en France et aux Etats-Unis, ainsi que sur la managérialisation de la haute fonction publique.
Publications
Gouverner les pauvres. Politiques sociales et administration du mérite, Rennes, Presses universitaires de Rennes, coll. "Res Publica", 2012.
"Gouverner par l’incitation? Sur la rémunération à la "performance" des hauts-fonctionnaires du Ministère des Finances", in Yves Deloye, Olivier Ihl, Alfredo Joignant (dir.), Gouverner par la science. Perspectives comparées, Grenoble, Presses universitaires de Grenoble, p. 109-134, à paraître en juin 2013.
"Un militantisme réformateur: les manuels du new public management", Revue internationale de politique comparée, vol. 19, n°3, 2012, p. 19-36.
"Une politique de récompense dans la magistrature. Le cas des primes de rendement des magistrats de cours d’appel et de cassation", Droit et société, vol. 79, 2011, p. 407-427.
"Un patronage philanthropique. La fondation Rockefeller et le traitement de la pauvreté à New York depuis 2007", Lien social et Politiques, vol. 65, printemps 2011, p. 101-119.


Didier DEBAISE: Un univers de possessions. L'approche spéculative des sociétés
Au début du XXe siècle, G. Tarde proposait une définition pour le moins surprenante du concept de "société": "la possession réciproque, sous des formes extrêmement variées, de tous par chacun"(1). En aucun cas, cette définition ne devait, dans son esprit, se limiter aux seules sociétés humaines, mais elle devait établir un point de jonction entre toutes les formes d’organisation sociale. Ainsi, Tarde n’hésite pas à écrire: "toute chose est une société, tout phénomène est un fait social"(2). De la matière inerte aux organisations sociales, nous retrouverions, sous des formes variées, une même logique qui se déploierait à des échelles différentes, et donc à l’intérieur de nouvelles contraintes, de rapports de possessions réciproques. Mais si Tarde l’annonce, le programme d’une philosophie plus générale de la possession ne s’arrête pas à lui. Elle se déploie dans une multiplicité de philosophies qui ont toutes cherché, chacune à leur manière, à affirmer l’importance d’enquêtes sur la constitution des sociétés à partir des dynamiques de la possession.
(1) Tarde, Monadologie et Sociologie, p. 85.
(2) Ibid., p. 58.


Didier Debaise est chercheur au Fonds National de la Recherche Scientifique (FNRS) et attaché à l’Université Libre de Bruxelles où il enseigne la philosophie contemporaine.
Publications
Un empirisme spéculatif (Paris, Vrin, 2006).
Le vocabulaire de Whitehead (Paris, Ellipses, 2007).
Les sujets de la nature, Presses Universitaires de France (à paraître).
ll a édité plusieurs ouvrages tels que Vie et expérimentation (Paris, Vrin, 2007) et Philosophie des possessions (Paris, Presses du réel, 2011) et écrit des articles sur les philosophies de Bergson, Tarde, Simondon, Deleuze et Whitehead.

Antoine DORÉ: Le public, l’individu et l’expérience des mondes (en) communs: lire Dewey au prisme d’une controverse environnementale
Partant de l’affirmation de John Dewey (1939, p.91), selon laquelle, "[...] les individus sont, en dernière analyse, les facteurs décisifs de la nature et du mouvement de la vie sociale", cette communication entend explorer la consistance ontologique des êtres collectifs dans les philosophies pragmatistes au prisme d’une analyse empirique de la composition des publics liés à la présence controversée des loups en France. Après avoir décrit le travail de médiation à partir duquel adviennent et circulent concomitamment des "loups menaçants", des "loups menacés" et leurs publics respectifs, il s’agira de rendre compte de la manière dont s’expérimente, avec plus ou moins de succès, une diplomatie de la "guerre des loups" qui participe de ce que Dewey appelle "l’organisation du public". Dans cette diplomatie expérimentale, nous montrons que l’articulation des intérêts discordants ne relève d’aucune inhérence préétablie, mais d’un travail collectif de mise en cohérence qui doit constamment être répété ou réinventé.

Antoine Doré est post-doctorant CNRS au laboratoire PACTE de Grenoble et chercheur associé au Centre de Sociologie des Organisations (CNRS/Sciences-Po). Ses recherches portent sur les dynamiques de production, de mobilisation et de circulation des connaissances et des normes dans les modes de gestion et de gouvernement du vivant (environnement et agriculture).
Publications
Doré, A. (2011), Des loups dans la Cité. Eléments d'écologie pragmatiste, Thèse de doctorat; Institut d'Etudes Politiques de Paris et Université de Liège.
Doré, A. (2010), "Le devenir politique des corps recomposés: la circulation des animaux dans l'espace public", Sociologie et Société, XLII (2), 181-204.
Doré, A. (2010), "Promenade dans les mondes vécus. Les animaux peuvent-ils être des interlocuteurs de l'enquête socio-anthropologique?", Sociétés, 108 (2), 33-45.


Jean-Noël FERRIÉ: Dieu et les croyants. Un être divin peut-il être adoré par un être collectif?
Si la relation à un être divin peut aisément être décrite comme une relation interpersonnelle, la relation entre les croyants, leur identification commune donne naissance à un être collectif. L'expérience de l'appartenance à un être collectif - pour autant qu'elle puisse être adéquatement décrite - est-elle une expérience du divin? On tentera de clarifier ces questions à partir d'une approche praxéologique.

Frédéric FOREST: Comment concevoir un sujet sans inconscient, un inconscient sans sujet?
Une institution, un Etat, une entreprise, une publicité tiennent des discours, sans interruption, inépuisables, sans arrêt. Que sont ces institutions et ces dispositifs sans ces discours? Ils peuvent ainsi apparaitre comme la consistance même de ces êtres collectifs. Mais où est donc alors le sujet de ces énoncés institutionnels? Non réductibles à une personne physique qui serait le représentant du collectif, le discours institutionnel semble pourtant procéder d'un vouloir particulièrement ferme. Qu'est ce que penser un sujet sans inconscient? A l'inverse, qu'est ce qu'un inconscient collectif sans sujet de l'énonciation? Un être collectif peut il vouloir tout en étant qu’un sujet de l’énoncé? Et, surtout, peut-il par conséquent être ambivalent? On s'interrogera sur ces dimensions frontières entre consistance du sujet collectif et inconsistance du sujet individuel.

Frédéric Forest est docteur en sciences politiques, diplômé en psychologie et en psychanalyse et chercheur associé au centre de recherche psychanalyse médecine et société (CRPMS) à l’université Paris 7 Diderot. Il est par ailleurs administrateur civil, diplômé en finances et exerce en tant que sous-directeur au ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche.
Il a notamment écrit: Freud et la science, éléments d’épistémologie, Anthropos Economica, 2010.
Il a notamment dirigé Les universités en France, fonctionnement et enjeux, PURH, 2012.


Jean-Louis GENARD: Intentionnalités, capacités et politique publique
La mise en dispositifs des notions de capacités et de compétences principalement mais pas seulement au sein des politiques publiques, une mise en dispositif qui en appelle alors à des ajustements des acteurs, interpellés, appelés à en répondre, l'appel étant bien entendu le symptôme d'une présupposition d'intentionnalité.

Dominique GUILLO: Les sociétés animales: apports croisés des sciences de la vie et des sciences sociales
L’objectif de cette communication est de poser la question de l’intentionnalité dans les collectifs animaux à un double niveau. Il s’agira tout d’abord, brièvement, d’analyser la manière dont la biologie conceptualise aujourd’hui la notion d’espèce, et les ruptures introduites sur ce thème par le néo-darwinisme avec le concept de population. Ensuite, après avoir tracé à grands traits la manière dont l’éthologie pose aujourd’hui la question de la socialité et de la culture dans le monde animal, on se demandera en quel sens on peut considérer que certains animaux sont des acteurs sociaux et culturels, en particulier dans leurs interactions avec les humains, à partir d’arguments tirés des sciences sociales et également, pour une part, des sciences de la vie.

Dominique Guillo est directeur de recherche au CNRS en sociologie (Centre Jacques Berque, Rabat). Ses recherches portent sur les liens entre sciences sociales et sciences de la vie. Il dirige le programme ANR LICORNES, consacré au thème nature / culture.
Publications:
Les figures de l’organisation, PUF, 2003,
La culture, le gène et le virus
, Hermann, 2009,
Ni Dieu, ni Darwin. Les français et la théorie de l’évolution, Ellipses, 2009,
 Des chiens et des humains, Le Pommier, 2009.


Denis LABORDE: Création musicale et permanences culturelles dans un monde globalisé
"Les cultures ont-elles une identité?", s’interroge l’ethnologue Gérard Lenclud. On admettra que le concept de culture a non seulement une signification mais une référence, que cette référence ne se conjugue pas au singulier et qu’il en va ainsi de toute forme culturelle comme il en est de la tradition, elle n’existe au singulier qu’à la condition d’être ouverte à de multiples formes d’appropriations différenciées (Pascal Boyer). Ce  sont précisément ces jeux de différenciation qui autorisent l’attribution d’une identité à une culture: chaque culture est ontologiquement subjective et épistémologiquement objective. Nous pouvons donc en étudier des formes d’appropriation inventive. Cette communication est consacrée à quelques formes d’invention musicale qui viennent se loger dans les insterstices de ce "grand désordre de l’expérience esthétique" (Jean-Louis Fabiani) qui font aujourd’hui recevoir, notamment dans le domaine des musiques du monde qui sera étudié, l’innovation musicale comme un moyen d’instituer une continuité de culture dans un monde globalisé.

Denis Laborde est ethnologue, Directeur de Recherche au CNRS. Il est membre du Centre Georg Simmel et enseigne à l’EHESS (Paris).
Publications
De Jean-Sébastien Bach à Glenn Gould. Magie du son et spectacle de la passion, Paris, L’Harmattan, 1997.
Musiques à l’école, Paris, Editions Bertrand-Lacoste, 1998.
La Mémoire et l’Instant. Les improvisations chantées du bertsulari basque, Bayonne, Saint-Sébastien, Elkar, 2005.
Ouvrages collectifs
Identifier, enquêter, analyser, conserver... Tout un monde de musiques, Paris, L’Harmattan, 1996.
(& Hermann Krapoth, Hrsg.), Erinnerung und Gesellschaft, Maurice Halbwachs (1877-1945), Wiesbaden, Zeitschrift für Soziologiegeschichte, 2005.
Désirs d’histoire. Politique, mémoire, identité, Paris, L’Harmattan, 2009.
Faut-il en finir avec la notion de culture?, Paris, L’Harmattan, 2013 (sous presse).


Annette LEIBING: Des réalités co-existantes: la consistance d'une procédure expérimentale dans le domaine médical
Coexistent realities: Stem cell researchers and the uncertainty of truth
The application of autologous bone marrow stem cells for heart disease has been and is being tested in over 100 clinical trials around the world. A number of factors play a role in explaining the popularity of this specific procedure. The apparent simplicity of the procedure is one reason, which also results in an easy acceptance by patients,  and a convincing reasoning of stem cell researchers in favor of this intervention. However, interviews with researchers showed that within the same interview different kinds of reasoning, even contradictions, and lots of uncertainty can be found. This talk explores what Annemarie Mol has called "coexistent realities" - the multiple, co-existing kinds of reasoning, which we found in interviews with stem cell researchers in Canada working on cardiac disease - and their struggle for certainty in need for funding, acceptance, and knowledge making.

Annette Leibing, anthropologue et professeure titulaire à la Faculté des sciences infirmières de l’Université de Montréal, est chercheure du CAU en gérontologie sociale du CSSS Cavendish (FQRSC) depuis 2004, et à l’équipe MÉOS depuis 2005. Son PhD en anthropologie de l’Université de Hambourg (1995) portait sur les différentes épistémologies dans la psychiatrie brésilienne. Elle a obtenu en 1995 un poste de professeure à l’Institut de psychiatrie de l’Université fédérale de Rio de Janeiro au Brésil, où elle a effectué des recherches sur la maladie d’Alzheimer. Elle a aussi été fondatrice d’un centre psycho-gériatrique publique. Durant son stage postdoctoral (2000/2001) à l’Université McGill, A. Leibing a poursuivi ses travaux sur la maladie d’Alzheimer. Elle a réalisé plusieurs monographies et articles scientifiques en diverses langues, en collaboration avec plusieurs groupes de recherche nationaux et internationaux. Ses intérêts de recherche se rapportent au vieillissement, aux maladies associées au vieillissement comme les  maladies d'Alzheimer et Parkinson, la santé mentale et les médicaments, et les nouvelles biotechnologies.

Jacques LOLIVE: La fabrication controversée des collectifs du fleuve Var
Depuis un siècle et demi, le fleuve Var n'a cessé de faire l'objet d'appropriations et de transformations diverses (extraction de granulats, digues, seuils, urbanisation en lit majeur et même en lit mineur) suscitant la fabrication (re-composition) de plusieurs collectifs inattendus qui brouillent les limites entre nature et société:
1) un collectif Var disponible pour l'artificialisation. Ce Var est un fleuve moderne, une réalité unitaire, objective, stabilisée et maîtrisable dans le monde cartésien des aménageurs et de l'expertise. C'est un objet qui se prête "docilement" aux projets des aménageurs et des urbanistes;
2) un collectif risque produit de l'action modernisatrice est révélé par la crue du Var de 1994 et les controverses qui s'ensuivent. Ce Var est le fleuve artificialisé, un hybride "sauvage" qui déborde les actions humaines de manière inattendue parce qu'il est lui-même une entité instable, une réalité proliférante, composite et mal contrôlée;
3) un collectif de nature en ville qui est le produit complexe de l'artificialisation du fleuve, de l'adaptation des espèces animales et végétales et de la mise en œuvre des procédures de protection de l'environnement. Ce Var est un support de biodiversité, un archipel de zones naturelles "à protéger";
4) un collectif métropolitain tiraillé entre la visée stratégique du développement urbain de Nice et l'ouverture aux questions environnementales. L'éco-vallée du Var "veut" être une vitrine du développement durable qui s'appuie sur la consistance des normes et les expérimentations urbaines.

Jacques Lolive est directeur de recherche au CNRS en science politique et aménagement au sein du laboratoire PACTE. Il analyse la question environnementale dans ses relations avec l'aménagement et sous différents perspectives: comme construction d'une cause collective, comme enjeu d'aménagement, comme risque environnemental et comme relation environnementale sensible et esthétique. Il a notamment coordonné en 2003, avec Olivier Soubeyran, le colloque de Cerisy, L'émergence des cosmopolitiques, publié à la Découverte, Paris, 2007.

Coralie MOUNET: Connaître par traces: le suivi des loups en France (communication élaborée avec Isabelle MAUZ)
Pister et piéger les loups nécessite une fine connaissance des traces laissées par ces animaux ainsi qu’une capacité à les mettre en récit, à leur donner du sens, en retraçant des comportements et des intentionnalités passés. La "trace" constitue un élément clef de la connaissance des animaux sauvages tels que les loups, dont la présence élusive interdit ou rend difficile un suivi direct des populations. Nous nous intéresserons aux dimensions pragmatiques d’une telle "connaissance par trace" (Ginzburg, 1980), en pointant les similarités dans la construction de savoirs différents, relevant de la lecture des empreintes au sol comme de l’analyse génétique des restes d’ADN présents dans les fèces des animaux. En particulier, nous montrerons la dépendance de ces savoirs à la matérialité de la trace, la nécessaire mise en récit de la trace dans son interprétation, et enfin la nécessité de s’affranchir des contingences matérielles de la trace dans le processus de certification de l’information.

Coralie Mounet est chargée de recherches au Cnrs, au laboratoire Pacte à Grenoble. Ses travaux de recherche en géographie portent sur les relations hommes / animaux sauvages.
Isabelle Mauz est chercheure en sociologie à Irstea, à Grenoble. Ses travaux de recherche s’inscrivent dans le champ de la sociologie de l’environnement et de la sociologie des sciences. Ils portent actuellement sur les institutions et modes de connaissance et de gestion de la biodiversité.
Publications
Mauz I. (2008), Les collectifs et leurs natures. Un parcours sociologique, des animaux emblématiques à la biodiversité, Mémoire d’HDR Spécialité Sciences juridiques, politiques, économiques de gestion, Cemagref, Grenoble ; Université Jean Monnet, Saint Etienne.
Mauz, I. (2005), Gens, cornes et crocs, Paris: Cemagref, Cirad, Ifremer, Inra.
Mounet C. (2007), Les territoires de l’imprévisible. Conflits, controverses et "vivre ensemble" autour de la gestion de la faune sauvage "à problème". Le cas du loup et du sanglier dans les Alpes françaises, Thèse de doctorat de géographie, Université Joseph Fourier, Grenoble I.
Mounet C., Mauz I. et Granjou C. (soumis), "Performer la "bonne" distance entre hommes et animaux: une lecture sociologique des pratiques de gestion de la faune sauvage", ethnographiques.org.


Catherine RÉMY: Quand l'animal fait et fait faire. Pourquoi étudier l'attribution d'intentionnalités aux animaux dans les situations sociales?
Dans cette communication, il s’agira de revenir sur le développement en France depuis une quinzaine d’années de ce que l’on peut appeler les "études animales" (de l’anglais "animal studies"). Dans un premier temps, j’évoquerai la tradition ethnologique française: si les ethnologues se sont depuis longtemps intéressés aux animaux, leur approche a été dominée par le paradigme de l’animal-représentation. Dans un second temps, je présenterai un ensemble de travaux qui ont remis en question ce paradigme et ont appréhendé l’animal comme un corps ou bien encore une présence active qui agit et fait agir les humains en retour. J’évoquerai ici les enquêtes que j’ai pu mener sur ces questions des relations homme-animal et montrerai comment cette approche éclaire sous un nouveau jour les situations sociales ou les pratiques étudiées. Enfin, j’aimerai évoquer les limites de ce "tournant animaliste" en sociologie et en anthropologie. Si l’animal est bien une présence agissante, il n’en demeure pas moins qu’une asymétrie demeure entre humains et non-humains. Cette asymétrie doit conduire le sociologue à ne pas négliger dans ces enquêtes la question de la différence ou des différences entre l’homme et l’animal.

Catherine Rémy est chargée de recherche au CNRS et membre du Centre de Sociologie de l’Innovation, Mines ParisTech. Ses travaux portent sur l’évolution des concepts de nature et de culture à travers la question du rapport des hommes aux animaux, et plus récemment sur les controverses socio-techniques relatives aux innovations biomédicales, notamment dans le domaine de la transplantation d’organes.
Elle a récemment publié La fin des bêtes. Une ethnographie de la mise à mort des animaux, Paris, Economica, 2009.


Guy SAEZ: La 'bonne volonté' culturelle. Institutionnalisation des représentations et retournement des intentionnalités
En 1849, R. Wagner propose une théorie révolutionnaire du théâtre national populaire et de l’œuvre d’art de l’avenir; quels liens entre ces théories et le festival de Bayreuth, manifestation la plus socialement exclusive qui soit, dès sa création? En 1971, une politique de "développement culturel" est proposée en France; en 1982, une administration spécifique lui est dédiée (la Direction du développement culturel) pour faire triompher le principe de politique culturelle qui lui est le plus opposé. A partir de ces deux exemples, on montrera les aléas du travail de l’institutionnalisation des représentations et des interprétations sociologiques qui veulent en rendre compte. Le partage de la culture sera saisi ici comme un mythe producteur de constructions récurrentes de réparation d'un manque qui, encore et toujours, semble manquer son objet. Mais c’est aussi l’un des mythes les plus puissants en démocratie puisqu’il est sommé d’unifier des collectifs et de leur donner du sens, voire une consistance.

Les travaux de Guy Saez s’inscrivent dans une sociologie de l’action publique, à la croisée du champ de la politique culturelle (histoire, idéologies, institutions, acteurs) et de la recomposition des systèmes territoriaux (coopération, décentralisation et régionalisation, effets transnationaux). Ils concernent une double construction: celle de la société interculturelle à l’ère mondialisée et celle de la société interterritoriale, réglée par des innovations institutionnelles et des procédures de coopération menant à la transition territoriale des systèmes politiques.
Publications
Guy Saez, Jean-Pierre Saez (dir.), Les nouveaux enjeux des politiques culturelles. Dynamiques européennes, Paris, La Découverte, 2012, 400 p.
Guy Saez, Geneviève Gentil, Michel Kneubühler (coord.), Le Fil de l’esprit. Augustin Girard, un parcours entre recherche et action, Paris, La Documentation française, 2011, 333p + CD audio.


Anne TRICOT: La perception sensible de l’environnement. Petite discussion autour de concepts et méthodes utilisés dans le cadre d’une recherche interdisciplinaire
Une discussion autour de la notion de perception de l’environnement sous l’angle du sensible. La condition sensible est souvent rangée au second plan comme si elle ne représentait pas une dimension importante des relations humaines à l’environnement; la notion de perception, qui plus est dans le champ du risque, se trouve souvent reléguée à une attitude passive, irrationnelle et peu connectée à l’action. A l’appui des travaux de J.-J. Gibson et de son concept d'"affordance" (1979) il s’agit de proposer une analyse de la perception comme activité située, rattachée à un contexte dont le propre est de donner du sens à l’environnement, à partir d’indices organisant notre attention et construisant des perspectives (I. Joseph, 2002). Il s’agit d’un sens partageable (et non d’un monologue intérieur) par une pluralité humaine et, en cela, il se relie à l’action. Les travaux d’A. Pecqueux (2012), prolongent la réflexion autour du concept d’affordance par la "perception d’événements", notion que nous avons reprise à notre compte car elle s’applique particulièrement bien à cet "existant collectif" et "doté d’intentionnalités" que constitue l’espace littoral. A l’interface terre-mer, par définition mobile, le littoral renvoie à une relation environnementale ambivalente, marquée par l’inquiétude et le risque, mais aussi le plaisir et le soin des lieux. Ce sont alors ces intentionnalités que l’on se propose de comprendre dans nos interactions avec l’environnement.

Anne Tricot est ingénieure au CNRS à l’UMR PACTE 5194. Ses travaux initiaux ont porté sur les questions d’habitabilité des espaces à risques d’inondations (confrontant l’expérience humaine aux normes de planification et de prévention des risques). Aujourd’hui elle s’intéresse à la thématique de l’eau dans la ville interrogée sous l’angle des risques mais aussi des adaptations des villes aux enjeux climatiques. Ses travaux accordent une attention particulière aux méthodes qualitatives et participatives utilisant des supports (photographiques, littéraires) pour rendre compte de la perception sensible à l’environnement.
Publications
A. Tricot., (2009), "Vers une écologie urbaine du risque? Entre logiques sécuritaires et logiques de l’habiter", dans  Fabrizio Cantelli, Marta Roca i Escoda, Joan Stavoo-Debauge et Luca Pattaroni, (dir), Sensibilités pragmatiques. Enquêter sur l’action publique, Bruxelles, P.I.E. Peter Lang, 2009.
A. Tricot et ali (2012), Capacités d’adaptation des sociétés littorales aux risques d’érosion, submersion en prise aux changements climatiques, programme GICC MEDTL 2008, rapport final août 2012 (partenaires: GEOMER, CRESSON, GSPM, CERSES, PACTE coord.).
A. Tricot, Lolive J., (à paraître 2013), "La prise en considération de la question climatique en situation controversée: l’exemple de deux communes littorales bretonnes, Gâvres et Guisseny", contribution à ouvrage collectif F. Bertrand (UMR CITERES-Tours), L. Rocher (UMR RIVES-Lyon) (dir.), Les territoires face au changement climatique. Observations et réflexions sur la 1ère génération des politiques climatiques locales, Peter Lang Edition.


Julien WEISBEIN: L'Europe par en bas. Ou comment réinterpréter certaines notions des European studies: européanisation, gouvernance multi-niveaux, société civile européenne
Les "études européennes" constituent un segment scientifique de plus en plus autonome à partir de l’argument selon lequel l’irréductibilité de son objet, présenté comme sui generis, rendrait nécessaire de forger un nouvel arsenal théorique, notamment alternatif aux canons usuels de la sociologie politique qui resterait trop stato-centrée ou trop dépendante de définitions dépassées du politique. Sur la base d’une enquête ethnographique menée au sujet d’une association française de surfeurs, il s’agira au contraire de voir en quoi une approche et des concepts de sociologie pragmatique (régimes d’engagement, axiomatique des cités) peuvent permettre de déplacer les façons de concevoir et de mettre en formes théoriques les objets de recherche dans les études européennes (avec les notions d’européanisation, de gouvernance multi-niveaux ou de société civile européenne) et donc de révéler de nombreux angles morts de ces approches.

Julien Weisbein est Maître de conférences de science politique à Sciences-Po Toulouse et directeur du LaSSP (Laboratoire des sciences sociales du politique, EA4715).
Publications
"La "société civile européenne" comme appui axiologique au gouvernement de l’Union européenne", in Bertrand Vayssière, dir., Reflets de la construction européenne. Réflexions, références et refus du débat sur l’Europe, Bruxelles, PIE Peter Lang, 2012, p. 329-344.
Julien Weisbein (avec Xabier Itçaina) dir., Marées noires et politique. Gestion et contestations de la pollution du Prestige en France et en Espagne, Paris, L’Harmattan, 2011.
"Vers une sociologie pragmatique de l'UE?", Politique européenne, n°33, 2011/1, p. 263-276.
(avec Philippe Terral), "Ce que savent les surfeurs: formes de traduction entre savoirs situés et registre expert dans le monde social du surf", in Yann Bérard, Renaud Crespin, dir., Aux frontières de l'expertise. Dialogues entre savoirs et pouvoirs, Rennes, PUR, 2010, p. 65-77.
(avec Romain Pasquier), "L’Europe au microscope du local. Manifeste pour une sociologie politique de l’intégration communautaire", Politique européenne, n°12, hiver 2004, p. 5-21.


SITOGRAPHIE :

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Avec le soutien
du CNRS, de l'ANR, du Laboratoire PACTE,
du Centre Jacques Berque à Rabat,
de l'Institut d'Etudes Politiques de Toulouse, du LaSSP
et des Instituts de Recherche en Santé du Canada


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