DU SAMEDI 2 JUILLET (19 H) AU SAMEDI 9 JUILLET (14
H) 2005
DESIGN ENTRE URGENCE ET ANTICIPATION
DIRECTION : Anne-Marie BOUTIN, Clément ROUSSEAU,
Jean-René TALOPP
ARGUMENT :
A la croisée de la création et de la
production industrielle, le design est un témoin
précieux des évolutions sociétales
contemporaines ainsi que des nouvelles façons
de travailler et de produire ensemble qui tendent à
se soumettre aux nécessités de l’urgence. Embrassant
l’espace allant du concept à la production «
en série », les designers ressentent quotidiennement
cette pression de l’urgence qui affecte notre manière
de vivre et de créer, en faisant advenir un nouveau
type d’individus...
Mais, dans la mesure où dessein et dessin sont
au cœur même de la mission du design, un travail
d’anticipation est aussi essentiel au créateur.
L’invention de nouveaux produits et services que les
consommateurs adopteront durablement passe par une
nécessaire « maturation » où
la durée devient valeur. Comment la création
peut-elle sortir vainqueur de cette apparente contradiction?
Quelles méthodes mettre au point pour réussir
« l’impossible »? Ne faut-il pas alors requalifier
le champ du design aujourd’hui? Quels apports éventuels
des sciences sociales, des théories de la conception
et de la prospective?
Voici quelques-unes des questions qui seront débattues,
pendant cette semaine, entre professionnels du
design, responsables d’entreprises et de collectivités,
enseignants et chercheurs.
CALENDRIER DÉFINITIF :
Samedi 2 juillet
Après-midi:
ACCUEIL DES PARTICIPANTS
Soirée:
Présentation du Centre, du colloque et des participants
Dimanche 3 juillet
Matin:
Les organisateurs précisent les enjeux et
développent leurs attentes à partir de points
de vue différents
- un directeur d'agence de communication par le design
(Clément ROUSSEAU)
- un directeur
d'école de design (Jean-René TALOPP)
- une responsable
de promotion du design (Anne-Marie BOUTIN)
Après-midi:
Urgence: moteur ou handicap?
Pierre GUILLET DE MONTHOUX:
L'entreprise d'art
Jean-Pierre BOUTINET:
Les exigences du design et les requalifications des temporalités
Edith HEURGON: Vers une nouvelle carte des temps
Lundi 4 juillet
Matin:
L'urgence, une chance pour le design
Jocelyne LE BŒUF: Design entre
urgence et anticipation au regard de l'histoire
Philippe LEMOINE: L'urgence, une chance pour le
design
Clément ROUSSEAU: L'urgence ... une chance pour Plan créatif
Après-midi:
Atelier : La recherche dans tous ses états,
animé et présenté par Brigitte BORJA DE MOZOTA,
avec Carole BOUCHARD (La recherche
en pratique: état de l'art des thèses
et fonctionnement d'un laboratoire de recherche en design),
Marie-Marguerite
GABILLARD (La recherche sur le terrain: témoignage),
Eliane DE VENDEUVRE (Design,
transport, mobilité), Bernadette
MADEUF (Que peut dire le chercheur en économie
sur le design?), Véronique
COVA (Problématiques et enjeux d'un design
de l'expérience de service) et Françoise
JOLLANT (La critique en design)
Soirée:
Atelier de créativité avec les participants,
animé par Paul Hubert des MESNARDS
Mardi 5 juillet
Matin:
Le design entre culture et consommation
Georges
AMAR: Qu'est-ce qu'un objet?
Yo KAMINAGAÏ & Eloi LE MOUËL: Design,
culture, culture d'entreprise
Gérard et Guillaume
DEMUTH: Micro-comportements et design, coproduire
la forme
Après-midi:
Trois écoles inventent des futurs possibles
- Les Ateliers / Ecole nationale supérieure de
création industrielle (Guillaume FOISSAC, Cécile HITIER,
David JUILLARD)
- Strate College designers (Rodolphe BERTHON, Brice DURY, Hanhua HU)
- Ecole nationale supérieure des Beaux-Arts de
Saint-Etienne (Edern GUERY, Thi Phuong Nam NGUYEN)
Soirée:
Table Ronde : L'objet dans la ville: qui décide
de l'urgence?, avec des élus locaux et animée
par Clément ROUSSEAU, avec Lyne COHEN-SOLAL (maire-adjoint
de Paris), Régine CHARVET PELLO (maire-adjoint
de Tours) et François JAMOND (Communauté de
Communes de Saint Etienne)
Mercredi 6 juillet
Matin:
Design, conception et design
Armand
HATCHUEL: Concept et forme, le regard du designer et
de l'ingénieur
Edith HEURGON & Josée LANDRIEU:
Design et prospective: faire advenir des futurs souhaitables?
Après-midi:
REPOS
Jeudi 7 juillet
Matin:
Urgence ou anticipation: attente du consommateur,
besoin de l'entreprise?
Danielle CHABAUD RYCHTER: L'innovation, l'usage
et le temps des hommes et des femmes
Philippe PICAUD: Attente du consommateur ou besoin
de l'entreprise
Après-midi:
Conception destruction: design et durabilité
Philippe TAUPIN: La
piste de l'intemporalité
André MALSCH: L'Eco-responsabilité
un enjeu majeur pour le déploiement du développement
durable
Rodophe ROSIER: Quand
les démarches d'anticipation peinent à penser
le devenir d'objets techniques
Soirée:
Thierry GAUDIN: Préliminaire à une prospective du
Design. Essai de contextualisation
Vendredi 8 juillet
Matin:
Quels futurs possibles?
Jean SCHNEIDER:
Quel cadre et quelles conditions pour inventer
des alternatives?
Stéphane GAUTHIER:
Hier le produit, demain l'offre
Christophe REBOURS: Analyser
les comportements d'aujourd'hui pour construire le
futur
Après-midi:
Quels enjeux pour l'éducation et la recherche?
Alain FINDELI: Les enjeux
pour l'éducation et la recherche en design
Jean-Baptiste TOUCHARD:
Entre urgence et anticipation, le designer scénarise
les futurs
Table Ronde de représentants d'écoles du design et d'écoles
d'ingénieur, avec notamment Marine LECOINTE (Saint-Etienne)
et Armand HATCHUEL
Soirée:
Atelier sur le Design de nuit
Catherine ESPINASSE: La nuit:
un temps singulier pour le design
Samedi 9 juillet
Matin:
Conclusions du colloque
Le regard des étudiants designers
Conclusion générale
Après-midi:
DÉPART DES PARTICIPANTS
RÉSUMÉS :
Brigitte BORJA DE MOZOTA:
La recherche entre urgence et anticipation
Faut–il adopter
pour définir la recherche en design la typologie
de Sir Christopher Frayling ou plutôt s’en tenir
au modèle commun de la recherche fondamentale et
de la recherche appliquée? Pourquoi est-il urgent d’organiser
la recherche en design en France? A travers plusieurs exemples
nous montrerons le paradoxe français:
- une recherche
vivante mais sans notoriété internationale: comparaison
du réseau Confère et du réseau de
l’European Academy of Design ;
- une recherche utile mais ignorée de la profession
ou des écoles de design: l’émergence
d’un nouveau modèle et de nouveaux diplômes.
Une question en conclusion: certains pays admettent le design
comme discipline universitaire, la France non. Peut-on
ou doit-on changer cela?
En quoi les
thèses sont fondamentales pour prendre pouvoir
sur sa profession.
Références Bibliographiques :
Design research, Brenda Laurel (editor), MIT Press
2003.
Design management, Brigitte Borja de Mozota, Editions
d’Organisation 2002, Allworth Press New York 2003.
Jean-Pierre BOUTINET: Les
exigences du design et les requalifications des temporalités
Le design s’offre
à nous comme démarche originale qui, historiquement,
a fait ses preuves. Il constitue l’une des formes reconnues
dans laquelle peut se mouler un acte de création.
Cette démarche a été expérimentée
à des époques où les temporalités
qui l’organisaient étaient plus stables et s’apparentaient
à la continuité, à la reprise, voire
à l’anticipation. Qu’en est-il aujourd’hui du recours
aux pratiques du design face à des temporalités
dominées par l’immédiateté et l’urgence?
Comment rendre possible l’acte de création en conciliant
ces exigences contradictoires que sont, d’un côté,
une démarche itérative propre au design, impliquant
un horizon temporel suffisamment distendu, de l’autre, des
contraintes environnementales et institutionnelles qui fonctionnent
la plupart du temps en flux tendus? Ne sommes-nous pas obligés
à devoir apprivoiser ces nouvelles temporalités
post-modernes qui s’offrent à nous dans leur excès? Les
apprivoiser, c’est chercher à les requalifier, c’est-à-dire
se donner les moyens de transformer leur profil éphémère
en un nouveau profil plus compatible avec l’acte de création,
celui du transitoire, lui aussi si souvent cultivé,
mais à meilleur escient, par nos environnements culturels
actuels. Cette dernière affirmation nous servira d’hypothèse
de travail à partir de laquelle s’organisera notre réflexion.
Véronique COVA:
Problématiques et enjeux d'un design de l'expérience
de service
Traditionnellement
orienté vers les objets, vers la matière,
comment envisager le design de l’immatériel qu’est
une expérience de service? Quels sont les problématiques
et les enjeux, d’un point de vue managérial,
d’un design capable de prendre en compte conjointement
la situation de service, l’interface de service et la relation
de service? Comment le design de l’expérience de service
peut-il marier urgence et mission? Comment mettre en phase
les ressources de l’entreprise d’un côté et les
compétences des clients de l’autre, tout en intégrant
les turbulences temporelles? Peut-on anticiper l’urgence?
Références Bibliographiques :
"Marchandisation et démarchandisation de la
relation de service" (2004), Economies et Sociétés,
série Economie et Gestion des Services,
n°6, 10/2004, pp.1701-1724.
"Le design des services" (2004), Decisions Marketing,
avril-juin, N°34, pp.29-40.
Alternatives Marketing: Réponses marketing aux
évolutions récentes des consommateurs,
(2001) avec B. Cova, Dunod, Paris.
Gérard et Guillaume
DEMUTH: Micro-comportements et design, coproduire
la forme
Il apparaît de plus en plus de micro-comportements
qui adoptent certains design et cette adoption entraîne
à se poser la question d'une double acculturation
du design aux flux de gestes (et inversement). En ce sens,
il semble que la coproduction design — vie quotidienne puisse
être renforcée par une coproduction plus forte
entre création et connaissance des micro-comportements
chez les designers.
De Tetra Pak à Lancôme en passant par la
RATP et France Telecom, les images peuvent permettre
de faire parler les micro-comportements. Leur faire
parler un langage qu'actuellement les designers cherchent
à mieux décrypter plutôt que d'être
contraints de le décréter par faute d'instrument
d'observation.
Sous l'angle
ethno, nous constatons qu'il apparaît des flux
de gestes individuels qui se déclinent en micro
comportements et sont la matière commune, le liant
des flux de masses. Cette fluidité des gestes entraîne
une fluidité des comportements. En conséquence,
il apparaît des gestes-comportements-réflexes: des
gestes qui impliquent dans leur pratique un comportement et
qui se font par réflexe.
Pour tenir
compte de cette modification des flux humains, le
design doit instaurer des pratiques d'échange avec
les instruments et les connaisseurs de l'évolution
socioculturelle. Le monde du design doit s'extraire d'une
relation d'asservissement au marketing, il a besoin d'apprendre
à outiller les comportements plutôt qu'à
représenter ou mimer les valeurs.
Le design
ne crée pas de nouveaux gestes, il fait foisonner
des besoins de mobilité, de geste, de faire.
Un objet design pour être bon, devra de plus en
plus être issu d'une coproduction entre la créativité
et la connaissance (ou l'observation) des micro comportements
qui lui donnent une raison d'être et le valident
en l'intégrant à leur fluidité.
Catherine ESPINASSE: La nuit:
un temps singulier pour le design
En tant que psychosociologue, chercheuse à la mission
prospective de la RATP, je ne suis pas une spécialiste du
design. Cependant la nuit est un de mes objets d’étude privilégié
depuis plusieurs années, comme en témoignent ma codirection
avec Edith Heurgon et Luc Gwiazdzinski de la décade sur «
la nuit en questions » à Cerisy en juillet 2004, la publication
d’une recherche menée avec Peggy Buhagiar sur les jeunes sortants
nocturnes: « Les passagers de la nuit » (L'Harmattan, 2004)
ainsi que mes recherches sur le réseau Noctambus de la RATP
(Extérieur Nuit, Intérieur Bus), sur les différentes
éditions de Nuit Blanche à Paris et enfin, sur
la notion de station et de « pôle » de nuit.
Ces travaux permettent de mettre en exergue les caractéristiques
et spécificités des représentations sociales
de la nuit, des vécus de ce temps singulier au cours duquel
s’instaurent d’autres pratiques et rapports à la ville et
où se produit peut-être une inversion des valeurs
par rapport au jour… D’où la difficulté et la nécessité
d’enlever nos « lunettes diurnes » pour aborder et penser la
nuit et, en particulier, le design de nuit. La nuit ne permet-elle pas
à la fois une anticipation du jour voire de futurs souhaitables
et d’échapper à la tyrannie diurne de l’urgence?
Pour la dernière soirée du colloque, je
propose d'animer, de 21 heures à minuit, un atelier
sur le design de nuit. Georges Amar, responsable de la prospective
à la RATP, a posé la question: "qu’est-ce qu’un objet? ".
Je vous suggère qu"au cours de cette séance de réflexion
collective et d’échanges, nous nous interrogions sur ce qu’est
un objet de nuit…, à partir des questionnements suivants:
- le design de nuit existe-t-il? Si oui, où? Et
de quelle manière? A quoi renvoie-t-il? Par quoi se caractérise-t-il?
- quels sont les domaines et univers où s’exprime
le design de nuit et quels sont en revanche ceux qu’il n’a pas investis?
En quoi ce design se distingue-t-il du design diurne? Où se
situent les frontières entre ces deux types de design?
- dans quelle mesure des objets conçus pour le
jour peuvent-ils être utilisés de nuit? Quels aménagements
ou métamorphoses les passages du jour à la nuit et
de la nuit au jour impliquent-ils?
- qu’est-ce qu’un objet de nuit? Quels sont ces objets?
Il conviendrait de recueillir auprès des participants à
l’atelier des exemples concrets d’objets conçus pour la nuit
et d'examiner les caractéristiques et fonctions qui leur sont
attribuées?
- qu’induit la nuit, en termes de conception et de création
? Dans quelle mesure la nuit est-elle source d’inspiration pour des
designers Quelle citoyenneté réinventer au travers des
objets et paysages nocturnes? Quels usages de la ville et des objets
suggérer la nuit?
- quels sont les sens sollicités la nuit, quels
besoins sont ressentis voire exacerbés? A propos de la «
fée électricité » qui met en danger la voûte
céleste, quel est le rôle attribué à l’éclairement
et à la luminance dans le design de nuit?
- comment penser et concevoir les objets (de) la nuit?
A quels futurs souhaitables de la nuit doit contribuer le design de
nuit?
Pour compléter cet atelier à l’attention
de ceux qui seraient tentés de prolonger la soirée,
il pourrait être envisagé une lecture de textes relatifs
à des objets de nuit, tels par exemple, des extraits de l’œuvre
de Witold Gombrowicz à propos de robe de chambre et de pyjama...
Alain FINDELI: Les enjeux pour
l'éducation et la recherche en design
Les conséquences
de la problématique de l’urgence et de l’anticipation
en design sont considérables pour l’éducation
des futurs designers et pour la recherche en design,
un champ actuellement en pleine expansion. Esquissons-les
brièvement dans ce résumé introductif.
On remarquera
tout d’abord que c’est l’activité de recherche qui
doit constituer la « locomotive » de la pédagogie
du design et non l’inverse. En effet, les chercheurs
sont tenus de construire, de justifier et de situer leurs
problématiques de recherche dans un cadre théorique
et conceptuel sans lequel toute argumentation scientifique
valide et cohérente devient impossible et stérile.
Un tel cadre est tout aussi indispensable pour ancrer l’enseignement
et la pédagogie du design si l’on ne souhaite pas se
contenter, comme c’est trop souvent le cas dans les écoles,
d’une simple reproduction de gestes, de pratiques et de principes
directement transférés depuis les milieux
professionnels. Une telle reproduction non réflexive
de cadres théoriques et conceptuels demeurés
implicites maintient les enseignements à la remorque
des diverses contingences (économiques, politiques,
esthétiques, médiatiques, etc.) auxquelles le design
est particulièrement sensible par nature.
Un examen circonstancié
de l’évolution récente des modèles
théoriques qui se proposent, de manière
normative ou descriptive, de décrire et de modéliser
l’acte de design révèle que leur centre
d’intérêt s’est considérablement
déplacé au cours des cinquante dernières
années; longtemps orientés vers le produit
final du projet, ils se sont intéressés ensuite,
à partir des années 60, au processus de projet
pour, très récemment, porter leur attention sur
les acteurs du projet et le conflit des diverses valeurs et
rationalités en présence. Cette « disparition
de l’objet » au profit des acteurs a pour conséquence,
en recherche, de mobiliser désormais massivement
les paradigmes des sciences anthroposociales, reléguant
ainsi au second plan les sciences pour la conception plus traditionnelles
(ingénierie, technologie, esthétique, ergonomie,
recherche opérationnelle, etc.).
Par ailleurs,
la temporalité de l’urgence, d’une part, et le souci
d’un développement plus durable, de l’autre, nous
amènent à réorienter les efforts de recherche
tant en amont de l’acte de design, là où
se prend l’initiative de tout projet et que se mettent en œuvre
les valeurs et les finalités souvent conflictuelles
qui le justifient, qu’en aval de l’acte d’usage où
le produit matériel ou logiciel issu du projet s’enracine
dans l’expérience individuelle des usagers et dans
la culture de la collectivité à laquelle ils et
elles appartiennent.
On comprendra
aisément les conséquences d’une telle
inflexion sur la construction des modèles théoriques
du design qui encadrent la recherche et sur l’appareillage
méthodologique qui la supporte. On en conclut
que le corpus des textes de la critique en design, inspirée
de la critique artistique, qui tient le plus souvent lieu
de cadre théorique au design, ne saurait constituer
un cadre conceptuel et méthodologique adéquat
pour une telle entreprise. C’est à des méthodes
plus systématiques, mieux reconnues et partagées
par la communauté scientifique internationale, qu’il
convient de faire appel avec, croyons-nous, une préférence
pour celles de la recherche qualitative et d’inspiration pragmatiste,
avec le souci d’un équilibre pertinent et justifié
entre les postures empirique et spéculative.
La conception
même de l’éducation des futurs designers
s’en trouvera interpellée. Très brièvement,
il s’agira de revoir la signification de l’enseignement
en atelier, là où se transmettent les compétences
nécessaires à la conduite du projet. Davantage
qu’un lieu de simulation « sur le tas » des situations
professionnelles, il convient de l’envisager comme un lieu
d’apprentissage, en situation pédagogique construite
à cet effet, des diverses logiques projectuelles décrites
par les modèles théoriques et comme un
lieu de validation du déploiement d’un processus de
modélisation de systèmes dynamiques complexes.
Plus particulièrement, c’est à une réflexion
approfondie sur le rapport théorie/pratique que
nous sommes tous et toutes conviés. Or sans cadre théorique
et conceptuel adéquat, cette nécessaire réflexion
ne saurait être menée à bien.
Marie-Marguerite
GABILLARD: La recherche sur le terrain: témoignage
Quelle
peut être la contribution d'un centre de ressources
pour les entreprises comme le Centre du Design Rhône-Alpes
au développement de la recherche?
Cheminement
— Actions phares des programmes et perspectives éventuelles
ouvertes aux principaux acteurs.
Stéphane GAUTHIER: Hier
le produit, demain l'offre
Par le passé et jusqu'à aujourd’hui,
la logique de l’entreprise a placé durant de très
nombreuses années le produit au cœur des réflexions
de son développement: quel produit pour remplacer telle ou
telle référence, quelles observations pour imaginer
son successeur, quelle technologie va permettre de « tuer »
la génération précédente? Cette démarche
centrée sur le produit comme valeur matérielle et
consommable a construit une logique de développement et de consommation
que les anglo-saxons qualifient de « Product First
». Or si cette logique a longtemps satisfait une société
de croissance et de développement (luxe / confort et équipements)
qui a été qualifiée de logique de progrès,
celle-ci se trouve aujourd’hui face à une autre réalité:
un taux d’équipements très élevé des biens
de consommations, un pouvoir d’achat stagnant, un taux d’échec
des lancements de nouveaux produits d’environ 90%… La consommation
est alors à la « traîne », le postulat
du « Product First » ne fonctionne plus! Il est urgent
de développer une autre logique, centrée sur la compréhension
et l’identification des envies profondes de consommation d’un individu.
Celle-ci ne doit pas se focaliser à mesurer son potentiel
à « acquérir les produits d’un secteur »,
mais à comprendre comment il cherche à parfaire ses
équipements ou sa situation, et par quels moyens il souhaite
accéder à ses objectifs. Il s’agit de construire une logique
centrée sur l’usager, que nous qualifions de « User
First ». Cette approche de conception impose d’oublier
le produit comme système marchand, pour se concentrer sur la
pertinence de l’offre et sur son accès. Cette démarche
n’est d’ailleurs pas si éloignée des préoccupation
du « développement durable ». Comment être concepteur
d’offre avant d’être concepteur de produit?
Pierre GUILLET DE MONTHOUX:
L'entreprise d'art
Cette intervention se donne pour objectif d’identifier et d’examiner
avec réalisme et fidélité les conditions dans
lesquelles peut naître une entreprise d’art. Dans une EU-rope
unie qui repose sur une longue pratique philosophique européenne,
une politique artistique active et une économie artistique,
une entreprise d‘art et un management esthétique pourraient
devenir une compétence EU-ropéenne unique dans une
perspective économique planétaire. A côté
de l’industrie et du commerce, de la production de marchandises et de services,
un business d’art EU-ropéen peut satisfaire notre besoin
d’une qualité de vie esthétique.
Dans un travail préparatoire à
la présente intervention, l’Esthétique du management,
j’ai analysé comment l’esthétique théorique pure
considérait le beau et le sublime: ce qui caractérise
une œuvre d’art. Le lien qui rattache une philosophie des Lumières,
laquelle pose en son centre un individu autonome capable de penser et
d’agir et une philosophie de l’entreprise, ne sera évident
que lorsque nous aurons compris que le substantif « entreprise
» provient du verbe « entreprendre ».
Il s’agit à présent de passer
d’une esthétique pure à une esthétique
appliquée, basée sur une recherche empirique de
l’action artistique pratique. Les exemples mêlés
de réflexions sont empruntés aux activités d’entreprises
théâtrales des deux derniers siècles dans
trois pays européens : la France, l’Allemagne et la Suède.
Une étude au Théâtre Royal Dramatique de Stockholm
a été menée en 1973 en collaboration avec Alf
Sjöberg. Grâce à l’aide de Frank Castorf de la Volksbühne
de Berlin et de Peter Wahlqvist du Théâtre Municipal
de Stockholm, j’ai pu illustrer les facteurs de changement actuels
qui affectent l’entreprise d’art des années 1990.
Edith HEURGON & Josée
LANDRIEU: Design et prospective du présent: faire advenir
des futurs souhaitables?
Face à un contexte sociétal inédit, nos
modes de penser, d’agir et de gouverner deviennent inadéquats.
L’écart se creuse entre la vitalité des gens et
la difficile réforme des institutions. À une logique
d’adaptation, il convient d’opposer un devoir d’invention. Nous
examinerons l’hypothèse suivante: le design et la prospective
du présent sont deux démarches maïeutiques
complémentaires, opérant sur la vie quotidienne des
personnes, qui, à certaines conditions, peuvent être
combinées pour faire advenir des futurs souhaitables liés
à un mode de gouvernance démocratique.
Si l’on en reste à une acception
classique de la Prospective (démarche éclairant
les futurs possibles sur la base de tendances lourdes et de signaux
faibles détectés par des experts) et du Design
(art de la recherche de formes nouvelles, adaptées
aux fonctions de l’objet), on peut souligner deux apports potentiels:
d’une part, la prospective peut apporter au design, en amont de la
création proprement dite, une capacité d’anticipation
des évolutions sociétales ; d’autre part, le design
peut apporter à la prospective une aptitude à concrétiser
par des objets tangibles les scénarios qu’elle imagine
et ainsi favoriser l’apprentissage et le changement. Mais, les
finalités demeurent fixées, dans le cadre des futurs
possibles, par le marketing et la stratégie des organisations.
D’où des démarches séquentielles (la prospective
en amont du design) et des programmes soumis à des urgences
venues d’ailleurs.
Si l’on adopte, en revanche, une conception
renouvelée de la Prospective, la Prospective du
présent (démarche interactive, exercée
en continu, qui prend appui sur les conduites innovantes afin
d’élargir le champ des possibles) et du Design (art
de produire des formes nouvelles associant à la fonctionnalité
des objets leur dimension poétique), alors Prospective du présent
et Design apparaissant comme deux façons complémentaires
de donner à voir ce qui est en train d’émerger dans
la société, d’anticiper les usages et les désirs.
A partir de ces germes, les sujets collectifs sont en mesure d’articuler
aux savoirs experts et aux connaissances du quotidien (ce que nous
avons appelé intelligence collective ), les expériences
sensibles incarnées dans des objets pour saisir le mouvement des
êtres et des choses afin d’imaginer ensemble des futurs souhaitables.
Les conditions à satisfaire pour
faire advenir des futurs souhaitables, outre le problème
des finalités déjà évoquées,
sont liées à des questions temporelles. Contre «
la tyrannie de l’urgence », la prospective du présent
invite à un présent duratif (καιροσ), moment de l’action,
qui se nourrit de l’expérience du passé et construit l’avenir
comme horizon de responsabilité. De même qu’au-delà
des statistiques, elle s’efforce de percevoir l’infime, le subtil,
l’entre-deux, par rapport aux catégories d’état,
elle privilégie les analyses de processus: elle cherche
à stimuler le mouvement, à accompagner les transformations
à l’œuvre dans la société en se situant aux points
de passages entre deux ordres ou situations, en imprimant un
tempo combinant temps forts (nécessaires pour le changement) et
lenteurs (utiles à l’apprentissage). C’est dire qu’à la notion
d’urgence, elle propose de substituer celle de « moment opportun
» et, plutôt que d’anticipation, elle se plaît à
imaginer une création continuée de sujets et d’objets, éphémères
ou durables, aptes à faire advenir des futurs souhaitables.
Opérant sur des champs de tension,
la Prospective du présent invite le Design à
sortir du carcan que lui imposent le marketing et la communication,
pour se développer en plein air au travers de processus
participatifs de conception/expérimentation/apprentissage,
afin d’appréhender finement et en dynamique les désirs
et les comportements des personnes de tous âges (à
la fois usagers et propriétaires, clients et citoyens, consommateurs
et producteurs). Il convient en outre de faire évoluer
les concepts et les catégories à partir desquels
le design se pense aujourd’hui (offre, demande, marchés,
clientèles, commande, programme, urgence, anticipation…),
mais aussi les objets qu’il produit (notamment au travers d’objets
relationnels, éphémères, modifiables…)
afin, au-delà de l’air du temps, d’investir résolument
le futur.
Nous argumenterons notre propos à
partir des résultats des colloques de Cerisy sur la
Prospective du présent et l’illustrerons sur quelques
exemples d’hier et d’aujourd’hui (le domaine de l’automobile,
la démarche Bus attitude à la RATP).
Jocelyne LE BŒUF: Design entre
urgence et anticipation au regard de l'histoire
Le thème de ce colloque suppose une réflexion:
- sur le design: parle t-on de profession (et sans doute
faudrait-il en parler au pluriel si l’on voulait cerner les différents
champs de compétences spécifiques qui y sont liés)?
parle t-on de méthode de création, de projet de société?
Faut-il penser, comme le philosophe Vilèm Flusser, que « tout
est aujourd’hui affaire de design » ;
- sur les notions d’urgence (nécessité d’agir vite)
et d’anticipation (prévoir, imaginer des événements
futurs): quels sont les enjeux, sont-ils les mêmes pour tous?
En introduction à un colloque organisé en
2004 par l’Université libre de Bruxelles et France Culture («
Peut-on, doit-on changer le monde? »), était posée
la question de l’unité face à l’ultra spécialisation
des savoirs et à la désagrégation des liens sociaux
et politiques. Peut-on envisager une unité des modes de connaissance
qui répondrait à un sujet unique « au même homme
qui réfléchit et qui rêve, qui cherche et qui
souffre »? Celui-ci a t-il une réalité?
Il me semble que cette même réflexion est au
cœur du débat envisagé par ce colloque sur le design:
- « y a t-il des méthodes pour réunir
l’impossible? » ;
- Où sont les contradictions? Entre urgence et anticipation?
;
- Le design peut-il aider à penser une unité
au profit de l’homme? ;
- Comment penser les échanges entre les différents
champs de savoirs pour faire avancer ces questions?
L’histoire, discipline portant sur la connaissance du passé
humain, est une réserve inépuisable de questions et leçons
sur la manière dont les hommes ont mis en forme leur rapport
au monde. Elle prendra des aspects différents selon la perspective
que l’historien aura choisi pour interroger son objet d’étude.
Peut-elle nous aider à penser la question de l’urgence et de
l’anticipation dans le domaine du design?
Bernadette MADEUF: Que peut dire
le chercheur en économie sur le design?
A priori, c’est plutôt vers la gestion, et
la recherche en gestion, que l’on se tournerait pour lancer des
analyses sur le design, sa définition, sa mesure, son rôle,
son impact… En effet, le design, comme « investissement de forme
», s’inscrit dans la stratégie des entreprises, depuis
la production (de la conception à la présentation
du produit) jusqu’au marketing, en passant même par l’organisation
des structures décisionnelles («design organisationnel
»).
Néanmoins, dans une économie en voie
de « dématérialisation » (croissance des
activités de service, importance croissante de la connaissance
et de l’information, contenu « intellectuel » des productions
et accélération du cycle de vie des produits, rôle
des technologies de l’information et de la communication…) on peut
comprendre que l’économiste se trouve sollicité, et qu’on
lui demande ce qu’il peut dire. Sa réaction première
sera de définir, circonscrire et mesurer si possible l’objet
(1. Le design: « cet obscur objet … ») avant de proposer
quelques réflexions sur des voies de recherche (2. La recherche:
au-delà des frontières).
André MALSCH: L'Eco-responsabilité
un enjeu majeur pour le déploiement du développement
durable
Steelcase, numéro 1 mondial du mobilier de bureau et de
l’aménagement des espaces tertiaires, mise sur l’éco-conception
en plaçant le produit au cœur des réflexions, et développe
ainsi une stratégie environnementale globale.
Steelcase s'est engagé depuis plusieurs années
dans une démarche volontaire d'éco-conception
qui lui a permis de réduire de manière significative
l’impact de ses produits sur l’environnement. L’éco-conception
se caractérise par une vision globale et vise à
intégrer les problématiques environnementales dans
la conception des produits ou services de manière
à limiter ses consommations de ressources naturelles, optimiser
ses impacts sur l’environnement et sur la santé humaine tout
au long de son cycle de vie. Aujourd'hui cet engagement éco-responsable
de la part de toute l'organisation s’inscrit dans une approche globale
de prise en compte des enjeux du développement durable.
Le développement durable vient rajouter
une problématique majeure, celle de trouver le meilleur
compromis, dans un lieu donné, à un moment donné,
pour concilier les impératifs de précaution et de
protection environnementale, d’optimisation des besoins sociaux, de
confort, d’accessibilité et d’intégration collective,
avec les constantes d’une bonne allocation des ressources.
André Malsch, responsable des Initiatives
de Développement durable chez Steelcase, présentera
la démarche d'éco-conception qui permet à
Steelcase de créer des produits qui intègrent, outre
les critères habituels de qualité, de fiabilité et
de prix, deux paramètres décisionnels fondamentaux: la santé
de l’homme et la préservation de l’environnement.
A propos de Steelcase
Steelcase aide ses clients à créer
des environnements de travail plus performants. La différenciation
de la marque vis-à-vis de ses concurrents a deux sources:
l’importance accordée à l’utilisateur final dans la conception
de nouveaux produits et la volonté de toujours mieux intégrer
le mobilier avec l’architecture et la technologie.
Fondée en 1912 et basée à
Grand Rapids (Michigan), l’entreprise est leader mondial du marché
du mobilier du bureau chaque année depuis 1974. Son portefeuille
produit inclue des produits architecturaux, des systèmes
de mobiliers de bureau, des sièges, des rangements ainsi que
des services financiers et de facilities management. Ils sont distribués
à travers un réseau mondial de plus de 900 concessionnaires
accrédités et indépendants et fabriqués
dans 50 sites. 16 000 employés travaillent pour Steelcase dans
le monde. Son chiffre d’affaire annuel 2005 s’est élevé
à $2.6 milliards.
Le siège international de Steelcase, couvrant
l’Europe, le Moyen Orient, l’Afrique, l’Asie et l’Amérique
Latine est basé à Strasbourg. Plus de 1500 personnes travaillent
pour le groupe en Alsace et en Lorraine.
Christophe REBOURS: Analyser
les comportements d'aujourd'hui pour construire le
futur
Se connaître aujourd’hui nous aide à nous projeter intelligemment
vers demain. Cette approche, qui peut paraître laborieuse pour
certains, nous intéresse à plusieurs titres. Tout d’abord,
elle est notre glaise. Depuis le début du XXème siècle,
via le mouvement Art & Industrie, le Bauhaus, l’Ecole d’Ulm, aujourd’hui
les Ecoles d’Arts Appliqués, ce courant a toujours placé
l’utilisateur au centre de la problématique de conception.
Ensuite, le raisonnement par le scénario permet de passer,
couche après couche, de l’existant à l’amélioré,
puis à l’innovant, puis au prospectif en retardant au maximum
l’incarnation de l’objet. Pour son bien et pour notre bien, il est urgent
de retarder l’apparition de l’image.
De ce point de vue, l’objet change de statut. Il devient l’élément
d’un système cognitif où l’individu et son corps propre
est en interaction avec une suite servicielle. L’objet est remis en question
dans sa confrontation à l’expérience, ce qui perturbe certaines
pensées sociologiques et marketing. Il n’est pas adapté au
phénomène d’ubiquité. Il n’est pas le bon support des
nouveaux langages...
Pourtant, cette mutation méthodologique est autant une opportunité
qu’une nécessité pour reconsidérer le rapport au temps,
dans les modes de vie aussi bien que dans la prestation du design.
Rodophe ROSIER: Quand les
démarches d'anticipation peinent à
penser le devenir d'objets techniques
Les innovations
techniques s’accompagnent souvent de la constitution
d’un imaginaire technique qui assure une fonction de
médiation entre les concepteurs et les futurs usagers
(Flichy, 1995). On retrouve aujourd’hui les manifestations
d’un tel imaginaire autour de la technologie « pile à
combustible à hydrogène » (PAC) qui serait
à la fois un vecteur d’énergie non polluant et une
énergie que chacun pourrait produire de manière
décentralisée (Rifkin, 2002). Paradoxalement,
face à l’urgence de développer cette énergie
propre, on constate que décideurs politiques, innovateurs,
ingénieurs et marketeurs s’échinent sans succès
depuis plus de quarante ans à identifier des applications
porteuses de valeur pour des PAC qui commencent à être
industrialisées. Doit-on y voir l’échec des démarches
traditionnelles d’anticipation concernant les PAC? La
communication présentera une démarche de «
design de la valeur » qui s’appuie sur la théorie
C-K (Hatchuel et Weil, 1999, Hatchuel et Weil, 2002) pour faire
émerger et évaluer des applications inédites
pour les PAC.
Références Bibliographiques :
Flichy, P. L'innovation
technique: récents développements en
sciences sociales, vers une nouvelle théorie de l'innovation,
La découverte, 1995.
Hatchuel, A., & Weil, B. « Pour une théorie
unifiée de la conception, Axiomatiques et processus
collectifs », 1-27, CGS Ecole des Mines / GIS cognition-CNRS,
Paris, 1999.
Hatchuel, A., & Weil, B. « La théorie C-K:
fondements et usages d'une théorie unifiée
de la conception". Actes du Colloque sciences de la
conception, Lyon, 15-16 mars 2002.
Rifkin, J., L’économie Hydrogène,
La découverte, 2002.
Philippe TAUPIN: La piste
de l’intemporalité
Face à un consommateur toujours en quête
de nouveautés et une hyper segmentation des
styles, le marketing design de l’intemporalité semble
s’affirmer comme une stratégie bénéfique
pour les entreprises qui cherchent à affirmer
leur identité de marque et stylistique.
Notre contribution
explore les pistes de l’intemporalité afin d’en
dégager plus tard un modèle. Nous avons porté
un regard de praticien sur l’intemporalité en analysant
la production de sens et les codes d’un corpus de
produits à forte valeur de consommation symbolique
dont le design a résisté à l’usure du Temps.
L’analyse des discours publicitaires sur l’intemporalité
complétée par un questionnement d’étudiants
designers suggère une première approche
des représentations associées à l’intemporalité.
L’approche sémiotique permet de dégager un
pré – modèle des stratégies du marketing
design de l’intemporalité et les différents
systèmes de valeurs associés.
Jean-Baptiste TOUCHARD:
Entre urgence et anticipation, le designer scénarise
les futurs
L'angoisse de
la société confrontée à l'innovation
technologique, découvrant les vastes horizons
dévoilés par la science, ébranlée
dans ses convictions, ses croyances et ses valeurs est
alimentée par les récits de ceux qui, à
un titre ou à un autre,s'autorisent à prédire
l'avenir, à le maudire par avance au nom d'une
rigueur morale héritée de, ou du moins cautionnée
par, la tradition ; à le vénérer
au nom d'un modernisme tout aussi intransigeant.
Intégrant la compréhension
des techniques dans une vision culturelle globale, rompu
à l'usage des outils de communication, le designer est probablement
l'un des acteurs sociaux le mieux à même de
présenter les scénarios sur lesquels se feront
les décisions, peut-être en partie les choix
de société. L'Ecole est certainement le lieu
dans lequel se pratique cette forme de recherche vigilante.
Eliane DE VENDEUVRE: Design, transport,
mobilité
Urgence et anticipation sont deux notions qui s’appliquent particulièrement
bien au domaine des transports pour lequel les designers ont un rôle
important à jouer.
Le Predit, programme interministériel de recherche et d’innovation
dans les transports terrestres, qui s’étend de 2002 à 2006
offre des opportunités pour les designers d’initier des recherches
ou de s’associer à des recherches thématiques faisant l’objet
d’appels d’offre.
Les premières recherches lancées portent sur le design
d’anticipation à travers le lancement du concours Re-Bus ou concours
européen de design pour la conception du bus du futur. Les nouveaux
concepts proposés montrent qu’il est possible d’innover dans ce
domaine.
En urgence, deux thèmes sont à l’ordre du jour :
l’accessibilité et la sécurité des voyageurs sur lesquels
les designers devraient s’exprimer.
Anticiper le futur, c’est aussi pour les designers s’inspirer de
la prospective pour réaliser des scénarios d’usages. Un
exemple est donné par la recherche prospective lancée par
la DRAST — Centre de prospective et de veille scientifique — Ministère
chargé des transports, à travers le programme AGORA 2020.
Une mine d’informations pour concevoir le futur...
BIBLIOGRAPHIE :
Nicole Aubert, Le culte de l’urgence, la société
malade du temps, Champs Flammarion, 2004.
Jean-Pierre Boutinet, Anthropologie du projet, Paris PUF, 2004.
Danielle Chabaud Richter, L’engendrement des choses, Editions
des archives contemporaines, 2004.
Pierre Guillet de Monthoux, The Art firm: aesthetic management
and analytical marketing, Stanford university press, 2004.
Zaki Laïdi, Le sacre du présent, Champs Flammarion,
2002.
Zaki Laïdi, La tyrannie de l'urgence, Les grandes conférences,
Editions Fides – Montreal, Musée de la civilisation – Québec
- 1998.
Zaki Laïdi, L’urgence ou la dévalorisation culturelle
de l’avenir, Esprit N° 240, P. 8-20.
Dominique Lestel, Les origines animales de la culture, Flammarion,
2001.
Colloque de Cerisy: Jean Eric Aubert et Josée Landrieu, Vers
des civilisations mondialisées? De l’éthologie à
la prospective, L’aube essai, 2004.
Colloque de Cerisy: François Ascher et Francis Godard, Modernité:
la nouvelle carte du temps, L’aube Datar, 2003.
Avec le soutien de Plan Créatif, de la Poste
et de la RATP